TOUT EST DIT

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mardi 29 juin 2010

Sauver l’Espagne ? 10 fois plus cher que la Grèce

“Une faillite de l’Espagne provoquerait la chute de l’euro et probablement celle de l’Union européenne”, a commenté l’ancien président du gouvernement espagnol, José María Aznar, lors de son passage à Paris le 2 juin, au Center of Political and Foreign Affairs. Alors que l’UE a mobilisé 80 milliards d’euros pour venir en aide à la Grèce, des économistes estiment qu’il en faudrait 10 fois plus en cas de défaillance de l’Espagne, soit 800 milliards d’euros.

Il faut dire que la situation économique de l’Espagne est particulièrement inquiétante. Fin 2009, le déficit budgétaire atteignait 11,2% du PIB, le troisième plus élevé de l’UE ! Pour inverser cette tendance, le gouvernement de M. Zapatero, fortement fragilisé, s’est engagé à le réduire à 3% du PIB en 2013. Pour atteindre cet objectif, des mesures d’austérité ont été adoptées de justesse par le Parlement. Celles-ci prévoient d’économiser 15 milliards d’euros en 2010 et en 2011, mais avec une grogne sociale en perspective. Ainsi, les salaires des fonctionnaires vont baisser de 5% cette année et seront gelés l’an prochain, une taxe sur les plus riches est en préparation et le “chèque bébé” de 2 500 euros va être supprimé.

Néanmoins, la rigueur n’est pas forcément salvatrice. Le gouvernement a revu à la baisse ses prévisions de croissance à 1,3% en 2011 et à 2,5% en 2012 (contre 1,8 et 2,9%). Pour 2010, le PIB devrait reculer de 0,3%. Cette annonce n’a pas tardé à avoir des répercussions sur l’Espagne. En effet, quelques heures plus tard (le 28 mai vers 19 heures), Fitch a dégradé sa note financière, à AA+, contre AAA précédemment.

Conséquence : l’écart de rendement des obligations souveraines espagnoles se creuse par rapport au Bund allemand, alourdissant encore plus les finances du pays. Or près de 32 milliards d’euros de dette publique arrivent à échéance au mois de juillet…

Chômage et endettement privé inquiétants
Malgré la plus forte baisse mensuelle du taux de chômage au mois de mai (1,8%) depuis cinq ans, le nombre de sans-emploi reste très élevé. En effet, avec 4,06 millions de chômeurs, soit 19,7% de la population active, l’Espagne détient le record de la zone euro. Les autorités prévoient un chômage supérieur à 19% cette année, de mauvais augure pour la consommation et le moral des ménages, qui a dégringolé en mai. Pour enrayer cette spirale, une réforme du marché du travail doit être entreprise, car un fossé sépare les CDI, ultra-protégés, et les CDD, précaires. Le gouvernement souhaite agir d’ici le 16 juin sur ce dossier, avec ou sans l’accord des syndicats. Des grèves et des manifestations sont d’ores et déjà programmées pour protester contre cette réforme.

Par ailleurs, d’après le chef des députés socialistes, José Antonio Alonso, l’endettement privé (banques, entreprises, ménages) représenterait 178% du PIB. “Le fort endettement des entreprises et des ménages est concentré dans le secteur du logement”, insiste l’OCDE. Un tel niveau est dangereux pour la croissance, surtout avec un chômage qui devrait rester élevé dans les années à venir (16% estimés en 2013).

Les banques plombent la Bourse
Avec l’avènement de la crise économique, l’Espagne a été confrontée à une explosion de la bulle immobilière, qui s’est formée dans les années 2000. Durant cette période, les banques ont prêté tous azimuts, mais, avec la chute des prix de la pierre, les créances douteuses se sont accumulées dans les bilans des banques. Le FMI a récemment recommandé une consolidation du secteur bancaire, surtout pour les caisses d’épargne régionales. Celles-ci sont très exposées au marché immobilier. C’est pourquoi la Banque d’Espagne les incite à fusionner, afin de les rendre plus solides. La deuxième banque régionale du pays, Caja Madrid, serait sur le point de demander une aide publique de 2,5 à 3 milliards d’euros. S&P l’a d’ailleurs placée sous surveillance négative, estimant que sa rentabilité allait diminuer, en raison de fortes provisions pour créances douteuses. Avec un secteur bancaire fragilisé, un fort taux de chômage et un endettement important, la Bourse a été particulièrement pénalisée.

En effet, l’indice phare de la Bourse de Madrid, l’Ibex 35, a dévissé de près de 24% depuis le 15 avril. Les valeurs bancaires ont souffert de la défiance des investisseurs.

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