Un engagement constant depuis 2001. Un lourd bilan : 45 morts, des centaines de blessés dans les rangs de notre armée. Depuis huit ans, face au conflit afghan, les Français gardent pourtant le silence. Bataille lointaine, buts de guerre changeants, professionnalisation des combattants : cette indifférence apparente peut avoir de nombreuses explications. Sans oublier la principale : le déni. Cachez cette guerre que je ne peux pas nommer (légitime défense ? lutte contre le terrorisme ? maintien de la paix ? installation de la démocratie ?) et que je ne veux pas voir (violences, bavures… ). Stratégie de l’édredon.
Du point de vue des responsables politiques, parier sur cet oubli serait pourtant une grave erreur. L’objectif (la pacification de l’Afghanistan) ne pourra être atteint que s’il est partagé. C’est l’opinion, et personne d’autre, qui, au final, légitime l’intervention. C’est elle qui soutient (ou pas) les efforts budgétaires nécessaires au moment des grands arbitrages. C’est elle qui fait corps (ou pas) avec les soldats… Aujourd’hui, majoritairement hostiles à l’intervention selon les sondages, les Français pourraient sans doute comprendre que la présence des forces alliées est, pour l’instant, la seule manière de stabiliser le pays, de lui donner un embryon d’institutions en évitant de le rendre aux talibans. À condition, toutefois, de le leur expliquer.
La transformation radicale de l’action de l’Otan après l’alternance à la Maison-Blanche (« La guerre continue pour que la guerre se termine ») a-t-elle été bien exposée ? Qui en parle vraiment ? Combien de débats à l’Assemblée nationale proposés par la majorité ou réclamés par l’opposition ?
Le silence est ancré. Il nourrit la rumeur. Celle d’un « nouveau Vietnam » promis, tour à tour, par Al-Qaida et par les Iraniens… Voilà les militaires français contraints de démentir. Malgré les attentats, des officiers constatent, dans les médias qui les accueillent, les avancées sur le terrain. Jamais ils ne s’aventureraient à crier victoire. Mais ils soulignent les progrès accomplis. Pendant le même temps, faute d’un véritable débat public qui permettrait que se développe un argumentaire construit, national et européen, sur l’implication des armées françaises et qui permettrait peut-être un consensus, Nicolas Sarkozy, Bernard Kouchner ou Hervé Morin répètent un vague décalque des justifications du Pentagone. Pas vraiment les mieux adaptées pour convaincre les Français.
François Ernenwein
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