A quoi sert donc le CSA, ce conseil supérieur de l'audiovisuel qui va recevoir aujourd'hui le nouveau président de France Télévisions ? Il y a cinq ans, c'est lui qui choisissait le patron de la télé publique. Cette fois il ne fera que l'écouter. D'institution souveraine contrariant les voeux de l'Élysée et de Matignon - en 2005, c'était Marc Tessier le favori du palais -, il aura muté en Chambre Soumise à l'Autorité du président de la République. Il n'a plus aucun pouvoir, en effet, pour contester le choix du chef de l'État. Quand l'Élysée l'a émasculé, il n'a même pas crié. Ce n'est pas maintenant qu'on risque de l'entendre. Pour une aussi grande démocratie que la France, cette reddition silencieuse n'est pas vraiment glorieuse. Une souffrance muette pour laquelle on n'aura aucune compassion tant elle transpire la lâcheté. La personnalité de Rémy Pflimlin n'est pas en cause. L'ancien directeur commercial des DNA est accueilli avec beaucoup de bienveillance à tous les étages de la grande maison. Un miracle, dans le climat politique délétère actuel, qu'il ne doit qu'à son autorité tranquille. Nul doute que le nouveau PDG saura gérer cette pétaudière permanente avec la même subtilité souriante qui l'avait fait réussir lors de ses quelques années à la direction générale de France 3. On le dit « lisse », il est rond, plutôt, s'il le veut bien, et indubitablement carré - son tempérament alsacien ? - quand il faut trancher. La crise politique est une chance pour lui. Toutes les énergies polémiques sont tournées vers l'incroyable feuilleton de l'affaire Woerth, et personne ne semble avoir l'intention de zapper sur son programme. Cette faible part de marché très provisoire va lui laisser les mains libres pour prendre les manettes en douceur et lui permettre, derrière l'écran de fumée d'une actualité passionnelle, de faire oublier le mode de nomination plombant, aussi dévalorisant que régressif, qui l'a amené dans son fauteuil présidentiel. Cet homme qui n'a guère le goût de la servilité et le sens (positif) de l'opportunisme politique va sans doute profiter de la faiblesse de sa tutelle pour imposer d'emblée son indépendance et ses choix. Le chef de l'État a d'autres chats à fouetter. Quoique... rien n'est jamais sûr dans une tempête médiatique où le positionnement des rédactions du service public risque d'être observé de près. Il hérite tout de même d'une situation anormale qui voit la tête de la télévision publique tomber pour la deuxième fois en cinq ans. S'il ne s'est pas fait remarquer par son audace Patrick de Carolis est loin d'avoir démérité et il avait misé sur la durée pour restructurer le paquebot pour dix ans. Tout est encore à recommencer. Plus belle la vie pour et avec Rémy Pflimlin ? On le souhaite...
Olivier Picard
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