TOUT EST DIT

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jeudi 8 juillet 2010

Claire Thibout : " Il y a eu beaucoup de personnes politiques qui ont reçu de l'argent… "

laire Thibout aime bien que les choses soient précises. Dans son audition, mercredi 7 juillet, réalisée dans le Gard, par les enquêteurs de la brigade financière, elle tient à remettre les choses en place et revient, partiellement, sur ses déclarations au site Mediapart.

D'abord, elle conteste la façon dont le site Mediapart a relaté les propos qu'elle lui a tenus. "L'article de Mediapart me fait dire que j'aurais déclaré quelque chose concernant la campagne électorale de M. Balladur. C'est totalement faux. C'est de la romance de Mediapart , assure-t-elle. De même que je n'ai jamais dit que des enveloppes étaient remises régulièrement à M. Sarkozy".
Mais si elle se rétracte pour partie, elle demeure très accusatrice. Ainsi, elle confirme que l'hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine était un lieu prisé par les hommes politiques. Elle précise même que "ces messieurs venaient pour avoir de l'argent" mais indique n'avoir jamais assisté à la moindre remise d'enveloppes. "Il y avait des enveloppes d'espèces qui étaient remises par M. Bettencourt ou de temps en temps par Mme Bettencourt à des politiques", relate-t-elle.

M. Sarkozy était-il concerné ? C'est "possible", avance-t-elle, sans qu'elle puisse prouver quoi que ce soit. Elle raconte les invitations à l'hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine. On y croisait, si l'on en croit Claire Thibout, Pierre Messmer, Mme Pompidou, François Léotard, Gérard Longuet, le couple Chirac, Edouard Balladur, Bernard Kouchner, Danielle Mitterrand ou encore Renaud Donnedieu de Vabres, Nicolas Sarkozy et plus récemment Éric Woerth.

"M.BETTENCOURT ME DISAIT: "J'AI BESOIN DE TELLE SOMME""

Elle raconte ensuite comment se préparaient ces rencontres : "M. Bettencourt me disait:" j'ai besoin de telle somme", généralement 50 à 100 000 euros. Après avoir retiré cette somme à la banque, lorsque celle-ci n'était pas disponible dans ma caisse, je la remettais à M. Bettencourt après avoir fait des liasses de 10 000 euros (…) M. Bettencourt me disait qu'il avait besoin de cette somme le jour même, en fonction de ses invitations ou de ses rendez-vous. Je constatais que l'enveloppe que je lui avais remise était vide après ces rendez-vous, car en me demandant de nouveau de l'argent, j'avais accès à sa serviette posée dans son bureau. Dans cette serviette il y avait l'enveloppe dont M. Bettencourt me demandait de vérifier le contenu. Soit cette enveloppe était vide, et M. Bettencourt me demandait de l'argent, soit il restait de l'argent, et il disait que ça suffisait ou me demandait de compléter".

Mme Thibout n'a assisté à aucune remise d'enveloppes à des hommes politiques. Elle déclare cependant : "M. et Mme Bettencourt étaient des personnes généreuses, et il y a eu beaucoup de personnes politiques qui ont reçu de l'argent". Elle ajoute : "Je ne veux pas faire de délation (…) pour ce qui est de M. Woerth, si il n'y avait pas eu les histoires de carnets, je n'en aurais jamais parlé à personne…" Ces fameux carnets, où la comptable couchait les sommes décaissées.

Elle confirme en tous points l'épisode qu'elle avait déjà relaté tant aux enquêteurs qu'à Mediapart. "M. de Maistre m'avait demandé avant les élections présidentielles de 2007 d'aller lui chercher 150 000 euros à la banque (…). Je lui ai demandé pourquoi une telle somme, il m'a répondu qu'il devait organiser un dîner avec M. Woerth pour la lui remettre. Il voulait que cela se passe par l'intermédiaire de Mme Bettencourt (…) Je lui ai dit que ce n'était pas possible surtout pour l'usage qu'il voulait en faire. Il s'est énervé".

Claire Thibout aurait alors dénoncé ces agissements auprès d'Eva A., chargée de clientèle à la BNP, qui aurait ensuite expliqué à M. de Maistre que tout cela ne pouvait se faire sans attirer l'attention de Tracfin, l'organisme anti-blanchiment de Bercy. Finalement, Claire Thibout ne disposera que de 50 000 euros. "J'ai mis dans une enveloppe la somme de 50 000 euros pour Mme Bettencourt. Il [M. de Maistre] m'a dit qu'il se débrouillerait du reste. Un peu plus tard, il a fait un commentaire, du style " des fois ça sert d'avoir des comptes en Suisse ". C'était lui qui gérait les comptes de Mme Bettencourt à l'étranger…". Elle le dit encore : "J'ai été là au moment où j'ai remis à Mme Bettencourt une enveloppe qu'elle a remise à Patrice de Maistre".

Tant M. de Maistre que M. Woerth ont catégoriquement nié. La date avancée par Mme Thibout dans Mediapart, à savoir le 26 mars 2007, n'est semble-t-il pas la bonne. Elle indique n'avoir jamais dit à Mediapart "oui c'est le 26 mars", et ne peut être plus précise que dans ses premières déclarations aux policiers. Cette scène se serait donc déroulée en mars-avril 2007. Les agendas de M. de Maistre, fournis à la police, ne portent aucune trace d'un dîner avec M. Woerth, à cette époque. "Je sais que ce dîner a eu lieu, croit savoir la comptable, car M. de Maistre me l'a dit..." Claire Thibout devait être confrontée à M. de Maistre, jeudi 8 juillet.
Gérard Davet

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