En choisissant Herman Van Rompuy comme président permanent du Conseil européen qui les réunit une fois par trimestre, les chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne ont choisi un homme de bien. Calme, pondéré, Européen de conviction, l'ancien Premier ministre belge, flamand et démocrate-chrétien, est rompu aux négociations les plus ardues et semble capable de rapprocher les points de vue les plus inconciliables. Mais est-ce l'homme de la situation ?
Pour l'instant, celui qui doit incarner, aux yeux du monde, les États européens fédérés n'a pas marqué de son empreinte une Europe en doute, interpellée par les marchés financiers, questionnée par ses grands partenaires et objet de la déception de ses citoyens inquiets. Il a prononcé quelques discours pleins de sagesse, beaucoup parlé anglais, comme c'est la mode à Bruxelles, certainement travaillé dur dans l'ombre des « grands » chefs d'État.
Certes, une personnalité ne peut redresser, à elle seule, une situation dans laquelle les États se montrent, chaque jour, plus jaloux de leurs prérogatives et n'ont pas le courage d'accélérer une intégration, pourtant la seule issue à la crise de confiance que traverse l'Europe. Mais on attendait davantage du président « stable », désigné pour deux ans et demi. À tort ou à raison, les Européens auraient bien aimé s'identifier et se retrouver dans le caractère entraînant d'une personnalité charismatique. Ils l'attendaient et la réclamaient.
La prudence et le réalisme de ce faux modeste ont finalement confirmé qu'il n'avait pas été choisi pour cela. Il n'a d'ailleurs pas pris le pas sur la présidence des différents comités de l'Union, qui continue à être exercée, à tour de rôle, par les Etats. La première de l'après-traité de Lisbonne, tenue par l'Espagne, n'a pas cessé d'essayer ¯ en vain ¯ de se faire valoir et de multiplier les couacs. Elle aurait bien mérité d'être occultée par un vrai président faisant preuve d'autorité. À compter du 1er juillet, espérons que les Belges joueront davantage le jeu avec l'un de leurs compatriotes !
Avec José Manuel Barroso, la collision était inévitable. Le président de la Commission européenne est censé incarner l'intérêt général au-dessus des États et il était à peu près évident qu'il dût se heurter à celui qui les représente. C'est désormais le cas et chaque événement international nous montre le spectacle d'une Europe qui s'est offert deux têtes de plus pour nous représenter : Herman Van Rompuy et Catherine Ashton, la « ministre des Affaires étrangères » de l'Union. Quand on ne veut pas de patron, on en choisit plusieurs !
Les institutions, en Europe comme ailleurs, sont d'abord ce que les hommes en font. Pour l'instant, le « Président de l'Europe » n'a pas su donner à l'Union un visage et une voix qui s'impose et s'exprime sur la scène mondiale. Il n'a pas contribué à offrir aux Européens de nouvelles occasions d'espérer. Or ils en ont besoin ; ils en ont les moyens, et c'est devenu une urgence.
(*) Président de la Fondation Robert-Schuman.
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