Combien étaient-ils exactement à manifester, ce jeudi, à travers les villes ensoleillées d'une France qui, pour apparaître démographiquement résignée, n'en est pas moins socialement très inquiète ? On pourrait tenter de répondre par des chiffres, mais on connaît trop la risible incertitude alimentée par les divergences comptables des organisateurs et de la police. Optons plutôt pour ce qu'on pourrait appeler une évaluation psychologique. Et là, il existe une expression qui convient mieux que tout : y'avait du monde. La formule dit bien ce qu'elle veut dire. C'est celle qu'on utilise pour mesurer tout à la fois la densité d'une foule d'anonymes et le succès d'un rassemblement de famille. La famille ? Elle était, d'une certaine manière, au centre des préoccupations. Car si une majorité de citoyens reconnaît à demi-mot la nécessité de travailler plus longtemps, un tel fatalisme n'édulcore en rien le grand désarroi transgénérationnel qui s'y greffe. Dans quel état physique parviendrons-nous à l'âge de cesser notre activité ? Comment nos enfants assumeront-ils leur rôle de sacrifiés dans un système qui a trop longtemps fait semblant de les choyer ? Voilà bien quelques-unes des questions propagées par des défilés beaucoup plus massifs que ceux du 27 mai. Mais il y avait sans doute plus grave encore. L'expression d'une immense crainte collective de l'injustice et du cynisme. Au moment où les cortèges grouillaient sous des bannières dénonçant le "métro-boulot-caveau" redouté, le président de la République recevait, toutes affaires cessantes, un footballeur au cœur du scandale que l'on sait. Le gouvernement ne peut se satisfaire d'avoir mené de façon assez habile la réforme jusque-là. S'il reste inerte face à la démonstration de force d'hier, ce qui planera sur un pays en proie aux soupçons exacerbés de favoritisme, ce sera quelque chose comme un sentiment de vaste pénibilité générale.
vendredi 25 juin 2010
Avis de pénibilité sur la France
Combien étaient-ils exactement à manifester, ce jeudi, à travers les villes ensoleillées d'une France qui, pour apparaître démographiquement résignée, n'en est pas moins socialement très inquiète ? On pourrait tenter de répondre par des chiffres, mais on connaît trop la risible incertitude alimentée par les divergences comptables des organisateurs et de la police. Optons plutôt pour ce qu'on pourrait appeler une évaluation psychologique. Et là, il existe une expression qui convient mieux que tout : y'avait du monde. La formule dit bien ce qu'elle veut dire. C'est celle qu'on utilise pour mesurer tout à la fois la densité d'une foule d'anonymes et le succès d'un rassemblement de famille. La famille ? Elle était, d'une certaine manière, au centre des préoccupations. Car si une majorité de citoyens reconnaît à demi-mot la nécessité de travailler plus longtemps, un tel fatalisme n'édulcore en rien le grand désarroi transgénérationnel qui s'y greffe. Dans quel état physique parviendrons-nous à l'âge de cesser notre activité ? Comment nos enfants assumeront-ils leur rôle de sacrifiés dans un système qui a trop longtemps fait semblant de les choyer ? Voilà bien quelques-unes des questions propagées par des défilés beaucoup plus massifs que ceux du 27 mai. Mais il y avait sans doute plus grave encore. L'expression d'une immense crainte collective de l'injustice et du cynisme. Au moment où les cortèges grouillaient sous des bannières dénonçant le "métro-boulot-caveau" redouté, le président de la République recevait, toutes affaires cessantes, un footballeur au cœur du scandale que l'on sait. Le gouvernement ne peut se satisfaire d'avoir mené de façon assez habile la réforme jusque-là. S'il reste inerte face à la démonstration de force d'hier, ce qui planera sur un pays en proie aux soupçons exacerbés de favoritisme, ce sera quelque chose comme un sentiment de vaste pénibilité générale.
Combien étaient-ils exactement à manifester, ce jeudi, à travers les villes ensoleillées d'une France qui, pour apparaître démographiquement résignée, n'en est pas moins socialement très inquiète ? On pourrait tenter de répondre par des chiffres, mais on connaît trop la risible incertitude alimentée par les divergences comptables des organisateurs et de la police. Optons plutôt pour ce qu'on pourrait appeler une évaluation psychologique. Et là, il existe une expression qui convient mieux que tout : y'avait du monde. La formule dit bien ce qu'elle veut dire. C'est celle qu'on utilise pour mesurer tout à la fois la densité d'une foule d'anonymes et le succès d'un rassemblement de famille. La famille ? Elle était, d'une certaine manière, au centre des préoccupations. Car si une majorité de citoyens reconnaît à demi-mot la nécessité de travailler plus longtemps, un tel fatalisme n'édulcore en rien le grand désarroi transgénérationnel qui s'y greffe. Dans quel état physique parviendrons-nous à l'âge de cesser notre activité ? Comment nos enfants assumeront-ils leur rôle de sacrifiés dans un système qui a trop longtemps fait semblant de les choyer ? Voilà bien quelques-unes des questions propagées par des défilés beaucoup plus massifs que ceux du 27 mai. Mais il y avait sans doute plus grave encore. L'expression d'une immense crainte collective de l'injustice et du cynisme. Au moment où les cortèges grouillaient sous des bannières dénonçant le "métro-boulot-caveau" redouté, le président de la République recevait, toutes affaires cessantes, un footballeur au cœur du scandale que l'on sait. Le gouvernement ne peut se satisfaire d'avoir mené de façon assez habile la réforme jusque-là. S'il reste inerte face à la démonstration de force d'hier, ce qui planera sur un pays en proie aux soupçons exacerbés de favoritisme, ce sera quelque chose comme un sentiment de vaste pénibilité générale.
D. Pobel
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire