La censure par le Conseil Constitutionnel de la taxe à 75% sur les hauts revenus crée un manque à spolier pour l’État. Aussi surprenant que cela puisse paraître, l'objectif de cette taxe n'est pas de permettre à l’État de continuer à dilapider la richesse créée par les Français. Une explication de Christian Eckert, rapporteur PS du budget à l'Assemblée.
Commençons par rappeler l'objectif, qui est dissuasif. Nous ne cherchons pas à percevoir un impôt pour alimenter le budget de l'État, mais à éviter que des salaires supérieurs à un million d'euros par personne ne soient versés. Ce sont ces salaires exorbitants, en période difficile où on demande des efforts à tout le monde, qui choquent les Français. Alors, cette taxe, c'est une amende plus qu'un impôt. Nous disons : Si vous dépassez la ligne jaune, vous payez.
Le Conseil constitutionnel a considéré qu'il s'agissait d'un impôt, alors que le Parlement – et François Hollande aussi – a considéré que c'était une taxe dissuasive, temporaire puisque prévue pour durer deux ans, donc exceptionnelle, et qu'on n'avait pas à lui fixer les règles de l'égalité devant l'impôt. D'ailleurs, il existe d'autres mesures fiscales individualisées. [...] Mais en se prononçant sur le mode de calcul, le Conseil constitutionnel a évité, contrairement à ce que dit la droite, de se prononcer sur l'aspect confiscatoire. C'est probablement la plus grande difficulté que l'on va avoir pour reconstruire un dispositif. On peut craindre que si l'on passe par l'impôt dans la nouvelle version le Conseil constitutionnel explique que la taxe est confiscatoire, puisque c'est ce qu'il a fait pour la taxation des bénéfices sur les stock-options et sur les retraites-chapeaux.
C'est une mesure symbolique, qui ne rapporte pas énormément d'argent, 200 millions d'euros par an, alors que l'on nous a laissé des déficits abyssaux. Mais les Français sont très attachés au symbole. C'est une des mesures qui a recueilli le plus d'adhésion dans les études d'opinion. Elle a joué un rôle important durant la campagne électorale. Donc il faudra reconstruire une mesure de ce type. On peut, par exemple, imaginer de cibler les entreprises qui pratiqueraient des salaires supérieurs à un million d'euros, soit en annulant les réductions de charges, soit en les amputant du crédit d'impôt-compétitivité. De toute façon, il n'y a pas le feu, il n'y a pas de projet de loi de finances dans les prochaines semaines, ni même dans les prochains mois. Il faut s'habituer dans ce pays à ce que le Parlement prenne un peu de temps pour légiférer.
Mais après, c'est toujours pareil, on nous oppose la concurrence internationale et la liberté d'entreprendre. Sans parler de quelques Gérard Depardieu...
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