mercredi 12 décembre 2012
François Hollande réussira-t-il à conserver une majorité politique jusqu’à la fin de son quinquennat ?
L'autorisation du mariage gay et de
l'adoption pour les couples homosexuels était l'une des promesses de
campagne de François Hollande. En attendant la décision de l'Assemblée
nationale le 26 décembre, le PS, par le biais de son Premier secrétaire,
Harlem Désir, maintient la pression sur le président de la République
en lançant une pétition.
Gérard Grumberg : Pour
le Parti socialiste, le mariage gay est l'occasion de reprendre un peu
l'initiative compte tenu du fait qu'il ne pouvait la prendre sur la
politique économique et européenne de François Hollande.
D'autant plus que les socialistes craignent la mobilisation des
adversaires du mariage homosexuel. Le souvenir de la situation de 1984,
avec la mobilisation pour l'école privée, qui avait obligé le
gouvernement de Pierre Mauroy à reculer, est toujours présent dans les
esprits. Cette pétition est une manière pour le PS de déplacer le terrain du débat et de montrer qu'il existe.
Sur les questions de
société, sur le mariage homosexuel comme sur le droit de vote des
étrangers, François Hollande a été assez clair et assez en pointe durant
sa campagne. Mais lorsque vous devenez président de la
République, vous êtes plus sensible à désamorcer les débats qui peuvent
diviser le pays. C'est ainsi qu'en 1984, François Mitterrand avait
choisi d'abandonner son projet d'école unique. Je pense que le
président de la République souhaite tenir ses promesses électorales sur
ces questions. Mais, avec les problèmes économiques et sociaux qu'il
rencontre, il se rend compte que ce sont de nouveaux champs de division
dans le pays et aborde ses problèmes avec plus de précautions que le PS.
Même
s'il a fait beaucoup de pas dans la direction sociale-démocrate, le
Parti socialiste n'est pas vraiment enthousiasmé par la politique
économique menée par François Hollande. Ce n'est pas dans sa culture.
Par conséquent, le PS peut vouloir marquer sa différence en se battant
sur les questions de société. Si le PS a bien compris que pour
des raisons d'arithmétique parlementaire, le droit de vote des étrangers
serait enterré, il veut être en pointe sur la question du mariage
homosexuel.
Tant
que le chef de l'Etat dispose d'une majorité favorable à l'Assemblée
nationale, il n'a pas de problèmes absolument fondamentaux. Même
s'il pourrait espérer une base électorale plus large, la manière dont
fonctionne les institutions permet à François Hollande de gouverner dans
la stabilité. Quant à la dissolution, Jacques Chirac nous a
montré qu'il est toujours extraordinairement risqué de faire de
nouvelles élections puisqu'en général on les perd.
François Hollande est un
président socialiste élu par la gauche. Il est bien obligé d'en tenir
compte, mais il est aussi soumis, comme tous les dirigeants européens, à
des pressions contradictoires : d'un côté la nécessité d'aller dans le
sens de l'intégration européenne et donc de mener des politiques de
rigueur, et de l'autre coté, les demandes de l'électorat et de son
propre parti.
Certains pays ont résolu cette
contradiction, au moins temporairement, en élargissant les bases du
gouvernement aux grands partis du centre-gauche et du centre-droit.
C'est ce qui s'est passé en Hollande ou en Grèce. C'est aussi,d'une
certaine façon, ce qui s'est passé en Italie avec le gouvernement Monti.
Les grands leaders sont soumis à des contradictions très fortes
entre lesquelles ils doivent naviguer. C'est leur rôle et ce n'est
jamais simple.
Le
problème du Modem, c'est qu'il n'existe pas d'un point de vue
parlementaire. François Hollande n'a donc aucun avantage à élargir sa
majorité. Compte tenu des pressions qu'il subies de son aile
gauche, ce serait très compliqué pour François Hollande d'assumer un
tournant politique après son tournant économique. Pour l'instant, ce n'est pas de saison.
Le problème vient du mode de scrutin spécifique à la France. Sans
scrutin proportionnel, il est très difficile de sortir de l'affrontement
droite/gauche. Il faudrait vraiment une crise majeure avec de nouvelles élections. Mais ce scénario n'est pas prévisible à court terme.
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