Les règles fixées sur la dépense publique ont été durcies par rapport aux promesses de campagne. Mais cela sera-t-il suffisant ?
Le gouvernement français, souvent accusé de ne pas tailler
suffisamment dans les dépenses pour s'attaquer au déficit public, a en
fait discrètement donné un tour de vis par rapport aux engagements de
campagne du président François Hollande.
Deux semaines après la présentation du premier budget du quinquennat,
le débat se concentre sur les 20 milliards d'euros de hausses d'impôts
supplémentaires prévues pour 2013. Mais, sur ce point, le candidat
Hollande avait annoncé la couleur dès janvier. L'effort sur la dépense
passe plus inaperçu.
Concrètement, l'État s'est engagé à geler
ses dépenses, hors pensions et charge de la dette, ce qui signifie
qu'elles ne pourront même plus évoluer au rythme de l'inflation. Cela
implique, fait valoir Bercy, une économie de 10 milliards en 2013. Pas
assez, répondent la droite et le patronat. "En réalité", proteste la
présidente du Medef, Laurence Parisot, il s'agit d'une "réduction de l'augmentation des dépenses publiques" plutôt que de véritables coupes.
Pour
autant, la gauche, une fois au pouvoir, a adapté son discours en la
matière par rapport au projet présidentiel du candidat François
Hollande. "Elle a été confrontée à la réalité de la situation", résume
l'économiste Tullia Bucco, de la banque Unicredit.
Avant l'élection de François Hollande, un ténor de son équipe confiait
qu'un socialiste n'avait "pas intérêt à faire campagne sur le thème de
la réduction des dépenses". Tout en laissant entendre qu'il saurait
prendre les décisions nécessaires.
Des arbitrages plus durs
Sans grande publicité, des arbitrages ont donc été rendus. Le projet électoral prévoyait une augmentation globale des dépenses publiques (État, collectivités locales et Sécurité sociale) de 1,1 % en volume par an en moyenne durant le quinquennat : la barre a été ramenée à 0,7 %.Les socialistes voulaient augmenter, à 3 % par an, l'objectif national de progression des dépenses de l'assurance maladie (Ondam) : il a finalement été fixé à 2,7 % pour l'an prochain et sera ensuite réduit à 2,6 %, puis 2,5 %.
Enfin, François Hollande candidat promettait de stabiliser les dotations de l'État aux collectivités locales "à leur niveau actuel" : François Hollande président de la République a tenu parole pour 2013, mais cette enveloppe baissera de 750 millions par an en 2014 et 2015.
50-50
"Si l'effort sur les dépenses a été accentué par rapport à la campagne, c'est à cause de ce que nous avons trouvé en arrivant", justifie la députée Karine Berger, secrétaire nationale du PS à l'économie. En cause, poursuit-elle, des recettes qui entraient moins bien qu'escompté par le précédent gouvernement, et une croissance économique en berne.Mais, selon Bercy, impossible d'aller plus loin pour l'instant. "À court terme, la réduction des dépenses a un effet plus récessif que les hausses d'impôts ciblées sur les hauts revenus et les grandes entreprises", plaide-t-on. Le gouvernement assure que, sur le quinquennat, le retour à l'équilibre des comptes publics sera réalisé à 50-50 par des économies et des hausses de prélèvements.
Reste une interrogation : la France, l'un des États qui dépensent le plus au monde, tiendra-t-elle ses engagements ? L'objectif est de ramener la dépense publique de 56,3 % du produit intérieur brut (PIB) cette année et à 53,6 % en 2017. Quelques pistes sont connues : stabilisation de la masse salariale de la fonction publique, arrêt de projets culturels, etc. Mais "il reste des risques de dérapage par rapport aux objectifs", estime Tullia Bucco, relevant que les coupes possibles dans les différents ministères n'ont pas encore été clairement identifiées.
L'économiste Patrick Artus, de la banque Natixis, est plus sévère. "Tout ça, c'est du folklore", grince-t-il. "Les dix milliards d'économies annoncés correspondent à la différence entre le gel des dépenses et la croissance économique prévue de 0,8 %. Mais comme on n'atteindra jamais 0,8 %, on ne réduira pas la dépense", affirme-t-il.
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