La visite suprise de la chancelière allemande, une première depuis cinq ans, intervient dans un contexte social tendu. Alors que le parlement grec s'apprête à voter de nouvelles mesures d'austérité, les manifestations sont quotidiennes dans la capitale grecque. Une partie du peuple grec, qui juge l'Allemagne responsable de la rigueur imposée au pays, voit dans cette visite l'opportunité de faire comprendre à la chancelière la gravité de la situation dans laquelle elle est se trouve.
Un acte « de soutien »
L'apparition inespérée d'Angela Merkel vise officiellement à soutenir le gouvernement grec, dont les caisses seront asséchées en novembre sans une aide extérieure. Lors d'une conférence de presse vendredi, le porte-parole de la chancelière a été très clair : « Le message que l'Allemagne veut transmettre à la Grèce est (...) nous voulons aider la Grèce et la stabiliser dans la zone euro. » Avant d'ajouter : « Nous constatons que le gouvernement Samaras fait un effort considérable pour mener les réformes, et nous souhaitons le soutenir dans son action. »
Vendredi dernier, le Premier ministre grec avait déploré dans un entretien au quotien économique allemand Handelsblatt que « la Grèce atteint la limite de ce qu'elle peut demander à son peuple. » Un constat alarmant qui, selon certains médias outre-Rhin, aurait décidé Angela Merkel à venir à Athènes. Pour d'autres, ce déplacement était prévu de longue date.
Le mauvais élève grec reçoit le maître allemand
Samedi, la presse grecque a largement titré sur le déplacement de la chancelière. A la une du quotidien Ta Nea, on peut voir une illustration de cette dernière, coiffée d'un casque sous le titre « Bienvenue, mais... » Depuis 2010, l'Allemagne, première contributrice du fonds de secours de la zone euro, a en effet imposé une politique exigente à la république héllénique. Les Grecs gardent en mémoire les propos controversés du ministre de l'Economie allemand, PhilippRösler, qui avait appelé à une sorte de mise sous tutelle du pays en janvier dernier.
Ces derniers temps, Berlin a appelé Athènes à la poursuite des réformes contenues dans le mémorandum, malgré une récession plus sévère que prévue pour 2012. Cette fermeté vise aussi à rassurer une partie de l'opinion publique allemande, appelée à voter en 2013, qui refuse de payer davantage pour le sauvetage du pays. Une position récemment rappelée par le ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble. « La Grèce a un ambitieux programme de réformes à remplir », avait-t-il martelé, qualifiant « d'unique » le problème grec, tout en averissant : « Nous ne pouvons pas faire un nouveau programme (d'aides) pour la Grèce. »
Mécontentement contre la presse populaire allemande
Nikos, un manifestant présent le 26 septembre dernier sur la place Syntagma, juge sévèremment l'attitude des Allemands : « Aujourd'hui, même si nous payons, l'Allemagne continue de nous traiter de fainéants. » Selon lui, « Berlin veut une Union économique, alors que l'Union européenne était destinée à être sociale. » Certains Grecs n'acceptent pas non plus, à l'instar de Nikos, « l'humiliation » que leur ont fait subir les médias allemands à l'occasion de cette crise. En particulier le quotidien populaire Bild connu pour mener une campagne agressive contre le plan d'aide à la Grèce.
En mars 2010, le journal n'avait pas hésité à utiliser la provocation en sommant les Grecs « à se lever tôt » en épinglant cyniquement le système. « En Allemagne, personne ne doit payer des milliers d'euros de pots-de-vin pour s'assurer un lit d'hôpital», critiquait le quotidien qui compte 12 millions de lecteurs.
Victime collatérale de cette dissension politico-financière entre les deux pays : le tourisme. Alors que les Allemands étaient les premiers à investir les îles grecques durant les années précédentes (2,2 millions en 2011), leur nombre a chuté de 50% en 2012.
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