À vrai dire, la position d'EELV n'est pas une surprise. Le différend européen avait été soigneusement écarté du pacte électoral conclu entre le candidat Hollande et le parti écologiste. L'entrée de deux ministres verts dans l'équipe de Jean-Marc Ayrault n'allait pas changer les convictions d'une base militante majoritairement opposée à la rigueur venue de Bruxelles ou de Berlin. Elle n'a pas suffi pas à faire évoluer des adhérents qui, en choisissant Eva Joly pour la présidentielle, avaient signifié leur allergie au compromis.
Daniel Cohn-Bendit, qui prend bruyamment ses distances, était lui-même opposé à ce traité européen qui n'a pas varié d'une virgule depuis l'accord Merkel-Sarkozy. Mais l'écologiste le plus européen d'entre tous a intégré le fait que le texte s'est accompagné d'évolutions prometteuses, en partie sous l'influence de la France.
Deuxième réserve quant à l'ampleur du séisme : arithmétiquement parlant, les socialistes peuvent se passer des voix écologistes pour voter le « paquet Europe ». En revanche, trouver une majorité avec l'UMP donnerait évidemment un argument, à gauche de la gauche, pour dénoncer le choix de l'austérité. Nul doute que le PS va multiplier les appels à serrer les rangs.
Troisièmement, les écologistes, sauf à vouloir se tirer une balle dans le pied, n'ont aucun intérêt à quitter le gouvernement. Certes, ils se sont rendus indispensables en contribuant à l'élection de François Hollande. Mais ils lui doivent tout autant de disposer d'un groupe de dix-huit députés, en dépit d'un mode d'élection défavorable. Rompre cet accord affaiblirait le gouvernement et eux plus encore, après une conférence de l'environnement qui leur apporte pourtant des assurances.
En dépit de ces bémols, il ne faut pas sous-estimer la profondeur du clivage qui lézarde la majorité. Car enfin, les sujets qui divisent ne sont pas mineurs : l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, le nucléaire, le doute à long terme autour du gaz de schiste et surtout l'Europe : ça fait beaucoup !
Car de l'engagement européen découle la programmation budgétaire, qui prévoit le retour à l'équilibre des comptes publics en fin de quinquennat, et toutes les politiques publiques. Rejeter le premier impliquerait logiquement de refuser la seconde. Les écologistes mettent ainsi leurs ministres devant une alternative très inconfortable : se taire ou démissionner. Ce faisant, ils font la même chose que la vingtaine de parlementaires socialistes qui viennent d'inventer l'idée incompréhensible du « non de soutien » au gouvernement !
Ces raidissements troublent d'autant plus qu'ils interviennent au moment même où les dirigeants se remettent à penser croissance et à vouloir taxer les transactions financières. Au moment, aussi, où l'engagement de la Banque centrale à racheter de la dette des États permet d'espérer, pour la première fois depuis le début de la crise, un sauvetage de l'euro. Il y a des moments où peser sur la réorientation de l'Europe est sans doute plus efficace que le purisme qui refuse de voir la différence entre militer et gouverner.
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