Réunis à La Rochelle pour leur université d'été, les socialistes ont des états d'âme face aux choix du gouvernement.
Roms, Syrie, croissance, avenir de l'euro, sécurité… le «rêve français» du candidat Hollande s'est enlisé dans l'exercice du pouvoir. «Ce n'est pas l'euphorie, ce n'est pas “tous heureux” comme on a pu le ressentir en 1981 ou 1997, constate la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann. Les socialistes sont à un carrefour. Ils sentent bien qu'il y a dans l'opinion un petit mouvement.»
Signes de défiance
La rentrée des désillusions? Dans les mesures annoncées par Jean-Marc Ayrault, certaines semblent déjà traduire un renoncement par rapport aux promesses de campagne. Le blocage «immédiat» du prix de l'essence est devenu une baisse «modeste et provisoire». Le doublement «immédiat» du plafond du livret A sera finalement progressif. Sans compter la hausse du smic qui, sans figurer précisément dans les engagements de campagne de Hollande, était tout de même un marqueur de gauche fort. Elle s'est finalement limitée à 2 %, au grand dam de la gauche du PS.Comme pour se mettre eux-mêmes en garde contre la tentation de renoncer à leurs promesses de campagne, les socialistes ont programmé samedi la diffusion du film L'Exercice de l'État qui décrit froidement la lassitude et le renoncement en politique. Mais déjà les déçus de l'élection présidentielle commencent à se faire entendre, jusqu'au sein même du PS où l'aile gauche n'en finit pas de réfléchir au dépôt d'une motion lors du prochain congrès de Toulouse. Ce serait un signe de défiance adressé directement à Jean-Marc Ayrault qui avait accepté de s'allier à Martine Aubry pour appeler à une motion unique de soutien à l'action de François Hollande. Les soutiens du président ressentent d'ailleurs du vague à l'âme. Alors que leur mentor s'est installé à l'Élysée, «ils ont le sentiment que l'appareil leur échappe, qu'ils sont les couillons, les dindons de la farce», explique un élu PS.
«Se tirer une balle dans le pied»
À cela s'ajoutent les attaques venues de l'extérieur du parti, notamment de Jean-Luc Mélenchon. Une partie de l'ancien courant de Benoît Hamon est tentée de se faire entendre pour ne pas laisser le champ libre au leader du Front de gauche. Depuis le début de l'été, il menace de ne pas voter le traité européen renégocié par Hollande.La grogne est suffisamment forte pour que le leader de l'aile gauche du PS, aujourd'hui ministre, prenne lui-même la peine d'appeler ses amis à la patience. «Parier aujourd'hui sur l'échec de François Hollande, c'est se tirer une balle dans le pied, prévient Benoît Hamon dans un entretien au Parisien. Je suis favorable à ce que le débat vive à gauche mais la situation est trop grave pour que l'on se divise artificiellement.» Silence dans les rangs, donc.
Sauf que les Verts n'ont pas l'intention de se taire. Et leurs prises de position contre le gouvernement - prix de l'essence, gaz de schiste - commencent à agacer au PS où l'on a toujours du mal à accepter que ces alliés turbulents aient pu décrocher un groupe à l'Assemblée nationale et deux portefeuilles ministériels. Mais les socialistes veulent, cette fois au moins, réussir leur rentrée. Harlem Désir l'assure: «Les universités d'été doivent montrer un PS de militants, ouvert et rassemblé, au moment où la droite est incapable de se rassembler sur un même campus et se déchire pour la présidence de l'UMP.»
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