TOUT EST DIT

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lundi 7 novembre 2011

Euro, l'heure de vérité

Journaliste, auteur de VGE, une vie (Flammarion), George Valance donne son analyse sur la crise de la zone euro.
 Un tabou vient de tomber : un pays membre de la zone euro peut la quitter, puisque même Mme Merkel a évoqué l’hypothèse d’une sortie de la Grèce. L’adhésion à la monnaie unique n’est pas irréversible, comme ses fondateurs l’ont toujours proclamé de peur de voir se détricoter la construction européenne. Telle est la première grande leçon de la crise de la dette. La deuxième est que les deux grands pays fondateurs de l’euro, la France et l’Allemagne, font bloc pour sauver cette monnaie unique, symbole de leur réconciliation historique, mais dont la crise actuelle révèle la fragilité.Il n’est pas dans l’Histoire d’union monétaire durable qui ne se soit appuyée sur un pouvoir politique solide. Qu’on se rappelle l’Union latine, premier système monétaire européen créé en 1865 et qui n’a pas survécu à la Grande Guerre. La leçon de l’Histoire s’impose d’elle-même : sans un saut qualitatif de l’Europe vers un système fédéral, l’Union monétaire ira de crise en crise jusqu’à son éclatement final. La méthode Jean Monnet consistant à privilégier le levier économique pour construire l’Europe a épuisé ses vertus : l’heure de vérité a sonné. L’heure du grand saut. Il revient à Nicolas Sarkozy et à Angela Merkel de l’esquisser on non. De parachever ou non un édifice monétaire lancé par leurs prédécesseurs.Jamais construction monétaire ne fut aussi personnalisée, aussi volontariste. En mars 1979, le Système monétaire européen n’aurait pas été mis en place sans l’amitié et l’action conjointe de Valéry Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt. L’opposition critique aujourd’hui le leadership franco-germanique dans la gestion de la crise grecque et « l’impolitesse » de Sarkozy et de Merkel. Mais que dire de la désinvolture de Giscard et de Schmidt lorsqu’ils présentèrent à leurs collègues européens stupéfaits un système monétaire qu’ils avaient fait étudier en secret par leurs collaborateurs et dont sortiront un jour l’union monétaire et l’euro? Que dire également du forcing politique auquel s’est livré François Mitterrand à Maastricht le 10 décembre 1991 pour que le chancelier Helmut Kohl fasse le pas de l’union monétaire, et que la réunification allemande s’accompagne d’un accrochage accru à l’Europe.
De Gaulle face à Adenauer, Giscard d’Estaing face à Schmidt, Mitterrand face à Kohl, et maintenant Sarkozy face à Merkel, tous partagent la même obsession : lier toujours davantage l’Allemagne à l’Europe afin qu’elle ne soit pas tentée de jouer en solo sa puissance recouvrée. Le problème est qu’à chaque étape, cette puissance s’est renforcée. Alors que la France a vu son industrie s’affaiblir, sa balance commerciale se déséquilibrer et son endettement se creuser. Dans les années 1960, un ministre allemand des Affaires étrangères s’interrogeait : "Quand les Français cesseront-ils de voyager en première avec un billet de seconde?" À l’époque, la formule était arrogante car la République fédérale restait un nain politique. Ces dernières semaines ont montré que ce n’est plus le cas.

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