TOUT EST DIT

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mercredi 10 août 2011

«Toutes les grandes villes du monde produisent ces désordres»

Sociologue, professeur à la London School of Economics, Tony Travers revient sur les émeutes de Tottenham.

Les violences ont démarré à Tottenham, là où un policier avait été lynché en 1985 après la mort d'une femme noire de 49 ans, cela ne peut être une coïncidence ?
Tony TRAVERS. - Il y a un passé sans aucun doute. La marche de samedi (pour réclamer justice après la mort de Mark Duggan NDLR) a eu lieu à Broadwater Farm, là où les troubles ont commencé dans les années 1980. Mais les choses ont vraiment changé depuis, les autorités locales et la police ont fait beaucoup d'efforts pour améliorer leurs relations avec la population locale, et celles-ci sont bien meilleures aujourd'hui.
Qu'est-ce que ces événements nous apprennent de la société britannique ?
À Londres aujourd'hui, comme il y a plusieurs centaines d'années, il y a des moments de désordres civils et occasionnellement des émeutes. Mais toutes les grandes villes du monde produisent ces mêmes désordres. On ne peut pas dire que la population originaire des Caraïbes soit responsable des troubles. J'ai regardé les reportages à la télévision et j'ai vu beaucoup de Blancs aussi parmi les pilleurs.
Quelles sont les motivations de ces jeunes ? Sont-ils en colère contre la police ou le gouvernement ?
Certains hommes politiques (Ken Livingstone, l'ancien maire de Londres, NDLR) pensent que cette colère est causée par les coupes budgétaires, mais la plupart de ces coupes ne sont pas encore effectives. Cela dit, dans des quartiers comme celui de Tottenham, même après des années de croissance économique à Londres, le taux de chômage reste élevé, particulièrement chez les jeunes. Donc oui, de nombreux jeunes gens sont oisifs et cette oisiveté les incite à mal se comporter.
La police a-t-elle bien réagi lors des incidents ?
On ne donne jamais raison à la police ! C'est vrai qu'elle a admis elle-même être en sous-effectif samedi soir. Mais soit elle emploie la méthode forte et il y a des confrontations, soit elle ne l'emploie pas et cela génère des émeutes. C'est ce qui s'est passé la nuit dernière.
A-t-elle un problème de crédibilité, après le scandale des écoutes qui a permis de découvrir que certains policiers étaient corrompus et vendaient des informations à la presse ?
Cela n'aide pas. Le fait que la police ait eu une mauvaise presse et que le chef de Scotland Yard ait dû démissionner affecte forcément l'attitude des gens dans la rue. Ce serait naïf de penser le contraire.
Peut-on s'attendre à des émeutes comme il y en a eu à Paris en 2005 ?
Les banlieues londoniennes sont très différentes des banlieues de Paris ou de Marseille, elles sont beaucoup plus mixtes. À Londres ce sont des petites rues avec des appartements à terrasses, et non des barres d'immeubles comme en France. Je ne pense pas que l'on va assister à une éruption de violences. Il pourrait y avoir une ou deux nuits supplémentaires d'incident isolés, mais les autorités locales, le gouvernement et la police, soumis à une énorme pression, ont le souci d'y mettre fin.
Comment la police va-t-elle faire ?
La meilleure chose à faire est d'envoyer en masse des policiers à pied, dans les rues. C'est une politique coûteuse, mais quand on envoie des hélicoptères ou des voitures, cela donne une impression de trouble, alors que des policiers à pied, cela donne une impression de contrôle. La police doit être aussi beaucoup plus à la pointe des réseaux sociaux comme Facebook, Twitter ou les messageries instantanées de Black­Berry. Ces nouveaux outils permettent de perturber l'ordre public comme ce n'était pas possible avant.

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