Je suis à la tête d'un Etat en faillite », avait dit, voici bientôt deux ans, le Premier ministre, François Fillon, dans une formule demeurée fameuse. Pas moins d'une quinzaine de présidents de conseil général pourraient à présent appliquer la même image au département qu'ils administrent. Eux aussi courent peu de risque d'être démentis par la suite des événements. L'état des lieux 2010 des comptes publics locaux publié par « Les Echos » révèle en effet une inquiétante fragilité financière des collectivités départementales.
C'est vrai en relatif, la situation budgétaire des communes et des régions étant globalement meilleure, en tout cas bien moins préoccupante que ne le proclament leurs représentants. C'est vrai dans l'absolu avec des départements sur le point de ne plus pouvoir remplir leur obligation d'équilibre budgétaire. La qualité de leur gestion n'en est pas l'unique responsable. Certes, les frais de personnels ont caracolé pendant des années, en particulier depuis le début de la décennie, bien plus vite que ne le justifiait le transfert de fonctionnaires d'Etat.
Mais depuis 2009, la tendance de ce point de vue est à l'assagissement. Et, surtout, les finances départementales sont victimes d'un redoutable effet de ciseau : d'un côté des recettes qui s'effondrent sous le poids de la crise - les droits de mutation par exemple -, de l'autre des crédits d'aide sociale qui s'envolent jusqu'à phagocyter, les unes après les autres, les marges de manoeuvre résiduelles - l'action culturelle ou l'amélioration de la voirie. Ce serait un tort de n'y voir qu'un phénomène conjoncturel, comme si la vague sociale qui secoue les départements était née de la dernière crise.
Les conseils généraux sont les victimes de politiques sociales dispendieuses et mal évaluées, qu'ils ont choisi d'amplifier. C'est un Etat longtemps impécunieux qui leur impose de gérer une allocation personnalisée d'autonomie dont le coût a été dangereusement sous-évalué par le gouvernement de Lionel Jospin qui l'a mise en place. Entre 2003 et 2010, les budgets consacrés à l'APA auront presque doublé, passant de 3 à 6 milliards d'euros.
Il est vain d'espérer, en asséchant leurs recettes, qu'elles taillent dans leurs dépenses. Personnes âgées, bénéficiaires du RMI, handicapés : guichets de l'Etat providence, les conseils généraux sont bien obligés de payer. Cela vient rappeler l'impérieuse nécessité d'une révision des politiques publiques. Au moins les départements devraient-ils commencer par évaluer ces aides complémentaires qu'ils ont mises en place au fil du temps, ici pour prendre en charge le coût des cartes de transport, là pour financer un logement social.
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