TOUT EST DIT

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mardi 27 juillet 2010

De l'utilité de l'Allemagne

En politique comme aux échecs, les meilleurs coups sont ceux qui peuvent servir simultanément plusieurs stratégies. La proposition de Nicolas Sarkozy de faire converger les systèmes fiscaux allemand et français pourrait, si elle est suivie d'effet, appartenir à cette catégorie. Elle est d'abord à usage interne : peu de voix s'élèveraient, dans la classe politique, contre un renforcement de la cohésion européenne autour du noyau franco-allemand. Quand l'action de l'exécutif se déroule sur ce terrain, les socialistes sont moins à l'aise pour la critiquer - on l'a vu lors du traitement en urgence de la crise bancaire en 2008. Quelle serait aujourd'hui la politique fiscale qui bénéficierait de cette « légitimation par l'Europe » ? Elle consisterait d'abord, du côté français, à s'abstenir d'augmenter les impôts (les prélèvements obligatoires atteignent 42,8 % du PIB chez nous, contre 39,5 % en Allemagne) et à envisager la suppression de l'impôt sur la fortune (effectuée par Helmut Kohl en 1997). Elle obligerait surtout à réduire les dépenses publiques (55,6 % du PIB en France, moins de 48 % chez nos voisins), ce qui permettrait de pratiquer la rigueur « au nom de la convergence », justification plus présentable que la nécessaire pingrerie d'un Etat impécunieux.

La proposition sarkozienne est aussi à usage externe : l'harmonisation fiscale entre les deux poids lourds européens serait un pas important vers ce « gouvernement économique » dont on parle des deux côtés du Rhin. Mais elle ferait pencher la balance du côté des conceptions françaises - une organisation fortement intégrée, limitée à la zone euro -plutôt que vers celles d'Angela Merkel, qui souhaite un dispositif plus lâche, couvrant l'ensemble des 27 pays membres. Accessoirement, elle aurait valeur d'exemple et pourrait inciter les autres pays de l'Union à renoncer au dumping fiscal. Voilà, dira-t-on, beaucoup d'arrière-pensées pour une initiative qui n'est sans doute qu'un ballon d'essai. Mais les idées lancées en l'air sont parfois les plus fécondes.

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