La gauche semble en mesure de faire basculer la majorité sénatoriale lors des prochaines élections.
Ils ont fait leurs comptes. Conclusion : c'est possible. Pour la première fois de l'histoire de la Ve République, la majorité sénatoriale semble à portée de vote de la gauche. Les victoires consécutives du PS aux élections locales (cantonales de 2004, municipales de 2008 et régionales de 2010) ont profondément modifié la composition du corps électoral qui désigne les sénateurs. À l'issue des prochaines élections, en septembre 2011, la gauche pourrait donc l'emporter. «Vous imaginez le symbole, à six mois de la présidentielle ! » s'enthousiasme-t-on au PS.
À l'UMP, on mesure bien la portée d'une telle révolution. «Que le Sénat bascule sous la présidence de Nicolas Sarkozy serait désastreux », gémit un sénateur. «L'essentiel des grands électeurs procède des élections municipales que nous avons largement perdues en 2008 », souligne un cadre du parti. «Il serait assez curieux que cette assemblée n'ait pas de perspective d'alternance, se console le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux. Au moins, on sait qu'il y a un enjeu l'année prochaine.»
Les sénateurs socialistes, de leur côté, se méfient des succès trop tôt annoncés. «Il ne faut pas s'enflammer. L'écart est encore grand», tempère le sénateur maire de Dijon, François Rebsamen. La partie sera serrée : la gauche devra remporter au minimum une quinzaine de sièges. Et dans ce cas, il faudrait nouer une alliance des communistes aux centristes.
Un an et demi avant l'élection, il est de toute façon beaucoup trop tôt pour livrer un sentiment. La protestation contre «le bazar territorial» - la réforme des collectivités - «crée un climat favorable» à la gauche, estime cependant le président du groupe PS, Jean-Pierre Bel. «La grande inconnue, c'est cette majorité silencieuse des élus locaux sans étiquette», poursuit-il.
Prétendants
Mais les esprits étant ce qu'ils sont, on cherche dès maintenant les prétendants potentiels à la présidence du Sénat. À la tête du groupe, Jean-Pierre Bel est le candidat a priori le plus légitime mais le moins connu. Le nom de l'ancienne ministre Catherine Tasca, actuelle vice-présidente, est aussi évoqué. Mais elle aura 69 ans en 2011 et n'incarne pas le renouvellement. L'ancien garde des Sceaux Robert Badinter, 82 ans, souffre encore plus du handicap de l'âge, mais son élection aurait une valeur symbolique à gauche. Enfin, François Rebsamen pourrait s'inviter dans la danse. Mais il n'est pas le favori de la première secrétaire du PS, Martine Aubry, avec qui il est en conflit ouvert. En cas de blocage entre la droite et la gauche, un centriste pourrait tirer son épingle du jeu. Le président de la commission des finances, Jean Arthuis, rêve d'être celui-là.
«Larcher en campagne»
«Les appétits ? Mais heureusement qu'ils existent ! s'exclame le président du Sénat, Gérard Larcher. Ce serait bien le diable si j'étais le seul à avoir de l'appétit, ici !Oui, je serai candidat à ma propre succession, je ne le cache pas. Et oui, je pense à 2011, d'autant que mon siège est renouvelable.» Mais le sénateur des Yvelines ne veut rien précipiter. «Je suis à mi-mandat et les Français n'attendent pas du Sénat qu'il s'occupe d'autre chose que de leurs préoccupations», explique-t-il en énumérant les dossiers à venir : la loi de modernisation rurale, la réforme des collectivités, celle des retraites…
«Larcher est en campagne pour sa réélection depuis le premier jour», souligne un élu UMP. Il met ainsi à profit sa tournée des départements (il en a visité 48 en dix-huit mois) pour «tisser sa toile». Mais en Beauceron, il se plaît à croire que «tant que la moisson n'est pas dans le grenier, elle n'est pas faite». Ce qui n'interdit pas de semer.
dimanche 11 avril 2010
Le PS rêve du Sénat en 2011
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