mercredi 8 octobre 2014
Le polyglotte de Matignon
Le polyglotte de Matignon
Vous ne trouvez pas qu'il en fait un peu trop, notre polyglotte de Matignon ? Voici que Manuel Valls clame son amour de l'entreprise sur tous les tons et dans toutes les langues. On admettra que sa version anglaise d'hier n'était pas la meilleure. Son credo « My government is pro-business » avait des accents laborieux. Mais on peut surtout craindre que ce soit auprès de ses amis socialistes qu'il ait le plus de mal à se faire comprendre. La révérence à David Cameron sera assurément restée en travers de la gorge des frondeurs du PS et de leurs amis. Pour eux, Manuel Valls se sera rendu à la City comme on va à Canossa, pour faire ami-ami avec cette finance encore honnie il n'y a pas si longtemps.
Sans souscrire davantage aux cruelles railleries, il faut admettre que l'opération de correction d'image de la France traduit la fébrilité de l'exécutif devant la situation économique du pays et l'appréciation redoutée de la Commission européenne sur le projet de budget 2015. Avec ses voyages récents en Allemagne et en Italie et avant d'autres visites aux Pays-Bas et au Luxembourg, Manuel Valls n'entend pas seulement rassurer le milieu des affaires.
Il espère bien recueillir le soutien de partenaires européens pour obtenir une inflexion de la politique d'austérité de Bruxelles et l'indulgence de la Commission. En s'accordant un « droit de City » à Londres, il n'a cependant pas forcément frappé à la bonne porte. David Cameron reste plus que jamais enclin à dérouler le tapis rouge sous les pieds des Français fortunés et des investisseurs, attirés par une fiscalité attrayante.
Alors qu'une pulsion isolationniste prospère en Grande-Bretagne, on voudrait être sûr que les appels de Manuel Valls à l'ancrage de la « perfide Albion » dans l'Union seront entendus. Le problème de la France réside désormais dans la crédibilité de sa parole. On a vu Pierre Moscovici sèchement recalé lors de son examen de passage de commissaire aux finances, devant le Parlement européen. Avec lui, comme avec Valls, voici la France engagée dans un incertain et perpétuel oral de rattrapage.
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