TOUT EST DIT

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lundi 9 septembre 2013

La France, otage du Congrès américain sur le dossier syrien : les scénarios possibles pour cette semaine


Le Congrès américain sera en mesure de se prononcer sur une éventuelle intervention en Syrie à partir du 9 septembre, date de la rentrée parlementaire. François Hollande a décidé d'attendre les résultats de ce vote, ainsi que les conclusions de l'ONU sur l'emploi d'armes chimiques par l'armée contre des civils syriens. Trois possibilités se présentent : le oui, le non et un potentiel accrochage militaire dans la région qui changerait radicalement la donne.

Barack Obama a annoncé vouloir conditionner le lancement d’une opération militaire à l’obtention d’un vote favorable du Congrès, qui sera en mesure de se prononcer à partir du lundi 9 septembre. S’il donne son accord, quelle sera la suite des événements pour les jours et les semaines à venir, et plus particulièrement pour la France ? A-t-on une idée du déroulement des opérations  ?

Guy Millière : La gestion de ce dossier par Obama a été profondément désastreuse. Après avoir dit qu'il n'avait pas besoin de l'aval du Congrès, il s'est tourné vers le Congrès, pensant que le ralliement de Républicains tels que John McCain, Lindsey Graham et John Boehner lui permettrait d'obtenir une majorité dans les deux chambres. Aujourd'hui, toutes les données indiquent que s'il reste à Obama une mince chance d'obtenir une majorité au Sénat,  il n'a quasiment aucune chance d'obtenir autre chose qu'une défaite à la Chambre des représentants. S'il n'obtient pas l'accord du Congrès, Obama pourra renoncer, et il aura profondément porter atteinte à ce qui lui restait de crédibilité internationale. Il pourra aussi passer outre, et décider de frappes quand même. Cela ouvrira alors une crise politique majeure aux Etats-Unis. Les opérations prévues, le cas échéant, devraient durer un maximum de trois jours et consister en frappes aériennes, ce qui ne sera pas à même  d'anéantir le régime Assad, mais ce qui pourrait ouvrir la porte à une exacerbation du conflit et à son expansion régionale. Le gouvernement français appuierait, sans doute, une opération militaire américaine menée dans ces conditions, mais n'irait pas au delà. François Hollande, ces jours derniers, s'est placé en retrait et a dit attendre le rapport des inspecteurs de l'ONU. C'est un recul et un choix de prudence après nombre de déclarations péremptoires.

Si au contraire le Congrès se prononce contre, cela veut-il dire que, par voie de conséquence, toute intervention de la France devient absolument inenvisageable  ? Une nouvelle "ligne rouge" à ne pas franchir pourrait-elle être fixée, ou bien le conflit syrien sera-t-il condamné à "s’auto-résoudre" sur le long terme  ? Quelle posture les différents membres de la communauté internationale adopteront-ils  ?

Je pense que le fait que le gouvernement français se soit placé en retrait signifie qu'il envisage la possibilité que le Congrès ne vote pas en faveur des opérations voulues par Obama, ce qui lui donnerait une porte de sortie.  Si, en fin de compte, le Congrès vote négativement, et si Obama renonce à agir, il sera difficile de voir comment une nouvelle "ligne rouge" pourrait être tracée. De toute façon, existe-t-il une ligne rouge  ? Obama a dit ces jours derniers, contre toute évidence, qu'il n'avait pas tracé de "ligne rouge" et que c'est le monde qui avait tracé une "ligne rouge". S'il n'y a pas d'action américaine, la guerre continuera en Syrie, et il sera tout à fait possible qu'elle dure encore longtemps.Aucune solution ne viendra des Nations Unies. Une solution politique autour d'une table de négociations est très difficilement envisageable. La conséquence essentielle d'une non intervention sera le message qui se trouvera ainsi envoyé à l'Iran, dont l'avancée vers l'arme atomique constitue le danger régional majeur, et trop largement oublié présentement. Hélas, la conséquence d'une intervention telle que celle envisagée par Obama serait l'envoi d'un message quasiment aussi délétère. Obama a placé les Etats-Unis dans une position de faiblesse très lourde de conséquences.

Un tir de missiles d’essai mené conjointement par les forces israéliennes et américaines le 3 septembre en Méditerranée    a provoqué un regain de tensions. Si un incident grave devait se produire avant le vote du congrès, par exemple à la frontière israélo-syrienne, Barack Obama pourrait-il décider de passer à l’action sans attendre le vote  ? La France suivrait-elle alors, et quelle serait la réaction de la Russie et de la Chine  ?

Ce tir de missiles d'essai a suscité quelques tensions, mais rien de majeur. Il n'y aura pas, je pense, d'incident grave à la frontière israélo-syrienne. Le régime Assad ne tient pas du tout, pour l'heure, à provoquer le moindre incident impliquant Israël. Les factions anti-Assad ne tiennent pas non plus à provoquer ce type d'incident. Le régime d'Assad n'envisagera l'élargissement du conflit que s'il est dans une position désespérée, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Les factions anti-Assad espèrent une intervention américaine à même de les aider, et même des groupes tels que Jabhat Al Nusra, quelle que soit leur haine envers Israël, n'entendent pas faire quoi que ce soit pour l'heure qui puisse nuire à l'éventualité d'une intervention américaine. Si, pure hypothèse d'école, un incident survenait, Obama ne déciderait pas de passer à l'action. La réaction serait Israélienne, et serait de l'ordre des réactions israéliennes menées ponctuellement en Syrie depuis le début de la guerre. La France, la Russie et la Chine ne s'en mêleraient pas.

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