TOUT EST DIT

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dimanche 16 juin 2013

«Hollande et Ayrault ont des toiles d’araignée dans la tête»!


Marianne : Le récent sondage Yougov pour le Huffington Post et i-Télé vous inquiète-t-il ? Certes, il a été réalisé par Internet par une société anglaise qui ne maîtrise sans doute pas totalement les particularités de la politique française, mais il annonce un Front national à 18% d’intentions de vote, en deuxième position derrière l’UMP (19%) et devant le Parti socialiste et le Front de gauche (15%) ? 
Yves Cochet : Je ne voudrais pas non plus relativiser ce sondage. Évidemment, on peut dire qu’il a été réalisé à un an des élections, par Internet et sur un très petit panel. Bien sûr, on peut aussi expliquer que les Français sont sans doute plus intéressés par les élections municipales qu’ils ne le sont par les élections européennes. Il n’empêche, il ne faut pas minimiser cette enquête d’opinion. 


  
D’abord parce qu’il nous montre un Front national très haut, ce qui doit bien entendu nous inquiéter. C’est pour moi une conséquence logique de la campagne de Nicolas Sarkozy qui a consisté à flatter le FN. Par ailleurs, cela correspond à l’effritement de la cohésion sociale partout en Europe. Celle-ci s’effondre au profit d’un économisme. François Hollande, par exemple, parle trop d’économie. Cette montée du FN s’explique aussi par la posture nouvelle de ce parti. Mais il reste toujours un parti très dangereux. 


Par ailleurs, votre parti Europe écologie, qui avait réussi aux européennes de 2009 à jouer des coudes avec le Parti socialiste en réunissant près de 16,3% des suffrages, n’est crédité que de 7% d’intentions de vote… 

Pour moi, la baisse des intentions de vote des écologistes s’explique pour deux raisons. Elle est d’abord un reliquat de la mauvaise campagne présidentielle d’Eva Joly. Elle s’explique ensuite par le fait que, contrairement aux européennes de 2009, Europe écologie ne bénéficie pas de « l’effet Dany Cohn-Bendit ». 


Votre participation au gouvernement n’explique-t-elle pas également ce peu d’attrait pour Europe écologie ? 

Je ne pense pas. C’est pour nous, écologistes, une stratégie ancienne. Nous l’avons fait en 1997, nous l’avons refait en 2012. On peut bien sûr considérer qu’Europe écologie a été entraîné un petit peu vers le bas par la participation au gouvernement, qu’il y ait eu une déception à l’égard du gouvernement dans son ensemble. Mais Cécile Duflot n’est pas une mauvaise ministre. Quant à Pascal Canfin, il n’est certes peut-être pas très connu, mais il fait du bon boulot au Développement. 


Alors, peut-être aurait-il fallu prendre le portefeuille de l’écologie ? Les écologistes ne le voulaient pas à l’origine, souhaitant prouver leurs compétences dans d’autres domaines. Mais il y a aujourd’hui une sorte de regret chez EELV. De nombreux dirigeants expliquent que s’il y a remaniement, il serait bon d’avoir cette fois en charge ce dossier ? En laissant l’écologie aux socialistes, n’avez-vous pas fait une erreur ? 

Je le crois. D’autant que Madame Delphine Batho n’est pas vraiment la meilleure ministre de l’Ecologie qui soit. On a d’ailleurs l’impression que l’écologie n’est pas la priorité du gouvernement. C’est terrible, mais cette question écologique est même moins débattue qu’à l’époque de Jean-Louis Borloo. Certes, Delphine Batho est plus dans la retenue qu’il ne l’était, mais tout de même, on peut s’interroger : est-ce que ce sujet la passionne ? 
  
Pour ma part, je suis pour quitter le gouvernement. Nous allons d’ailleurs en débattre lors de notre prochain congrès à Caen au mois de novembre prochain. Nous avons passé un an au gouvernement, l’accord passé avec le PS n’a pas été totalement respecté et le bilan est globalement décevant. Il vaudrait mieux pour nous que nous partions. Je sais bien que Pascal Durand, notre secrétaire national, voudrait que l’on reste au gouvernement… 


C’est d’ailleurs ce qui a été décidé lors de votre conseil fédéral fin mai ? 

Oui, il y a eu une motion dont la ligne consiste à dire : « On continue, il faut qu’on y soit et que l’on tente de changer le cap du gouvernement ». Mais je ne crois pas un instant que le Premier ministre et le Président de la République veuillent « changer de cap ». François Hollande a une phrase magique qu’il ne cesse de répéter : « Nous allons inverser la courbe du chômage ». Mais le plus souvent cette phrase est suivie d’une seconde : « Si la croissance reprend ». Or, mon analyse est qu’il n’y aura pas de reprise, la croissance ne reviendra pas. Il nous faut penser une société, une économie, en décroissance, en récession. François Hollande et Jean-Marc Ayrault sont des gens de bonne volonté. Je les connais, je les ai côtoyés pendant des années à l’Assemblée, mais ils ont des toiles d’araignée dans la tête et ne peuvent pas mener cette réflexion… 

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