CHEVALIER BAYARD EN COUCHE CULOTTE
mercredi 15 mai 2013
Paris à feu et à sang
Paris à feu et à sang
Sirènes hurlantes, ballet d’hélicoptères, une tension dans l’air : lundi soir, depuis notre appartement parisien nous sentions qu’il se passait quelque chose d’inhabituel. L’AFP – sur laquelle nous sommes branchés à distance – n’indiquait rien de particulier. Ah oui, il y avait la fête du PSG ; les joueurs devaient se faire remettre l’Hexagoal sur la place du Trocadéro. Il y a eu, comme dit la presse, des « débordements ». En fait, ce n’était pas grand-chose, un peu de « bêtise humaine ». C’est le maire de Paris, Bertrand Delanoë, qui a fait ce commentaire mémorable, lundi soir sur RMC-Sport :
« Il y a eu quelques débordements, quelques perturbateurs. Mais globalement ceux qui aiment le PSG ont fait la fête. J’ai vu des milliers de jeunes et de moins jeunes qui aiment le PSG, le football et qui étaient heureux d’être là avec leurs joueurs champions. Il y a eu un peu de bêtise humaine mais ça ne doit pas masquer la foule des gens sympa venus faire la fête du sport, du foot et du PSG. J’essaie de ne pas donner trop d’importance à ce qui est dérisoire, secondaire et condamnable. »
Les images qui ont tourné en boucle sur des chaînes comme BFM ou I-Télé, les tweets des témoins présents dans les quartiers du Trocadéro, de l’Etoile ou de la Tour Eiffel content une tout autre histoire. Ce qui s’est passé à Paris, devant les forces de l’ordre impuissantes et manifestement en nombre très largement insuffisant, c’est une vraie guérilla urbaine.
Et on pouvait la voir venir. Vingt-et-une personnes avaient déjà été interpellées dans la nuit de dimanche à lundi et trois placées en garde à vue après des « incidents » sur les Champs-Elysées. Des jeunes de la manif pour tous ? Non, des supporters du PSG, comme l’écrivait hier Olivier Figueras dans un papier « resté au marbre » faute de place – ah, comme Présent aimerait avoir les moyens de doubler sa taille, nous avons toujours tant de choses à vous dire ! La casse des vitrines, des terrasses de bars et des scooters avaient commencé la veille. Bilan : seize membres des forces de l’ordre blessés.
Notez que celles-ci venaient de quitter précipitamment une pacifique (pour ne pas dire pacifiste) réunion des « Veilleurs » contre le « mariage pour tous » qu’ils venaient de menacer d’un an de prison s’ils ne déguerpissaient pas des abords des Champs-Elysées – pour laisser la place aux hooligans ?
Lundi soir, ce sont quelque 15 000 supporters qui se sont massés sur la place du Trocadéro. Pétards, fumigènes, prise d’assaut – très dangereuse – d’échafaudages : ce n’étaient pas de braves gamins venus applaudir sagement leurs héros, qui d’ailleurs s’étaient approchés de leur tribune en encourageant, du haut de leur bus à impériale, par la voix de Mamadou Sakho, les supporters à promettre des « relations anales avec les Marseillais et la foule lui répondait » (c’est ce que raconte Clément Guillou, journaliste à Rue89, sous le titre ironique « Scènes de liesse »).
Il y avait paraît-il aussi les « Ultras », les supporters interdits du virage Auteuil, à qui les gros médias font porter l’essentiel de la responsabilité de ce qui s’en est suivi : jets de barrières sur les CRS, affrontements, coups, projectiles, lancers de verre pilé, invasion des tribunes (les journalistes ont dû partir comme des lapins), le tout accompagné d’insultes et de gestes obscènes. Non, ce n’est pas la France bien élevée qui était dans la rue. Bilan : 30 blessés, des CRS en sang, des évacuations d’urgence vers les hôpitaux alentour.
Expliquant qu’on n’organise pas un tel événement dans un quartier comme le Trocadéro où il y a « beaucoup de rues » (sic) un savant spécialiste du football intervenant sur BFM assurait qu’avec une telle concentration de personnes, les « débordements » étaient inévitables. Un autre assurait timidement, dans un parfait antiracisme auto-censeur, qu’un troisième groupe habituellement attiré par ce genre de concentration de personnes était venu « de la périphérie de la ville ».
Parler de bandes ethniques eût été à la fois plus rapide et plus exact : la concision est un art français qui se perd avec le reste.
Et pour parler encore plus clairement, il suffit de regarder les vidéos qui circulent sur certains sites d’information : ces hordes de voyous ont semé la désolation partout depuis l’Etoile jusqu’à la tour Eiffel. Vitrines cassées, voitures incendiées (le bilan doit être classé secret-défense, c’est comme ça aussi « traditionnellement » pour la Saint-Sylvestre), équipements urbains réduits en gravats, magasins pillés, la peur parmi les braves gens et les passants qui se réfugiaient, tremblants, dans les cours d’immeubles… On a cassé aussi des bus qui circulaient là par malheur. Un groupe opportuniste a bloqué un car de touriste et vidé ses soutes, en plein jour sous le Trocadéro, et impunément. Avenue Kléber, rien n’a résisté – une fois que les forces de l’ordre l’eurent ouverte au « public » et se furent carapatées, ainsi qu’accuse une riveraine. Avenue d’Eylau, pas une voiture intacte, assure le tweet d’un passant.
La police a procédé à 21 interpellations.
Les dépêches de l’AFP qui nourrissent l’essentiel de la presse sont restées d’une discrétion de violette, eu égard à l’importance des violences et des décombres que d’autres ont montrés.
L’UMP appelle à la démission de Manuel Valls qui n’a rien vu venir. Ce Manuel qui réserve ses gaz, ses menaces et ses interpellations à d’autres : à la « France bien élevée » qui manifeste pour le bien commun sans que l’on déplore un seul dégât aux biens publics. L’UMP peut parler : mais l’UMP ne dénonce pas la cause de cette nouvelle sauvagerie – la contre-éducation donnée par l’école de la République et son rôle dans la constitution de zones de non-droit où des bandes ethniques s’entraînent à la barbarie.
Marine Le Pen a estimé lundi soir que Manuel Valls aurait dû interdire le rassemblement de fin de journée au Trocadéro « au vu des débordements de la veille », et dénoncé « des déferlements de racailles », de « barbares qui n’ont rien à voir avec les supporters du club sportif » qui ont « saccagé » le cœur de Paris.
Il faudra se souvenir de l’attitude des médias, qui à l’instar de Delanoë ont minimisé les événements d’une façon ahurissante. Ce sont les mêmes qui voient la République vaciller et les extrémistes dans la rue lorsque les petits jeunes et moins jeunes des « Manifs pour tous » finissent gazés ou au poste pour aucune raison du tout.
CHEVALIER BAYARD EN COUCHE CULOTTE
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