Pour Hervé Gattegno, le recul du président de la République sur les 3 % de déficit est un camouflet. Il a dû abdiquer toute forme de relance.
Après avoir officialisé le renoncement à l'objectif des 3 % de déficit, le gouvernement s'apprête à prendre de nouvelles mesures de rigueur. Votre parti pris : François Hollande n'a plus d'autre politique qu'un plan d'économies... Pourquoi dites-vous cela ?
lundi 18 février 2013
La politique de Hollande n'est plus qu'un plan d'économies
Le recul de François Hollande sur les 3 % de déficit n'est pas une surprise, mais c'est un camouflet - devant les Français et l'Europe, où il doit quémander un délai comme un client endetté à son banquier. La conséquence, c'est aussi qu'il a dû abdiquer devant nos partenaires européens toute prétention à une forme de relance - alors qu'il en avait fait sa martingale. Au chapitre des abandons, il y a aussi ses incantations contre la finance (la modestie de la réforme bancaire l'a montré). En vérité, François Hollande avait rêvé d'une autre politique économique ; à présent, sa seule politique est de trouver d'autres économies...
La cause du revirement, c'est que la prévision de croissance du gouvernement était trop optimiste. Est-ce que c'était une tromperie ? Une erreur ?
Un peu des deux : un excès d'optimisme qui permettait de glisser un peu de rose dans un programme déjà assez gris... En politique, il y a souvent peu d'écart entre volontarisme et irréalisme. En économie, on parle de "prophéties auto-réalisatrices" : des objectifs ambitieux créent la confiance et le système repart... Ce n'est pas ce qui est arrivé. On est passé du rose au morose - et même à la sinistrose. Croissance zéro, chômage en hausse, malaise social ; avec la pression de l'Europe et le rapport de la Cour des comptes, tous les ministres tremblent pour leur budget. Au passage, la Jeunesse et les Sports et la Formation professionnelle sont parmi les premiers touchés : deux ministères que François Hollande avait déclarés prioritaires. Un autre signe des reniements en cours...
La ministre Cécile Duflot a adressé hier dans Le JDD une mise en garde contre une trop forte réduction des dépenses. Est-ce que l'austérité pourrait - en plus - provoquer une crise politique ?
Qu'il y ait des dissensions au gouvernement, ça ne fait pas de doute. La politique de rigueur a déjà fait imploser la majorité présidentielle, puisque le Front de gauche se comporte en opposant. Il reste à François Hollande une majorité parlementaire : les Verts en font partie ; s'ils en sortaient, le PS serait encore maître de l'Assemblée, mais pas du Sénat. On n'en est pas là. Cécile Duflot défend son budget comme une politicienne déjà aguerrie, mais on ne peut pas dire qu'elle dramatise l'enjeu. À vrai dire, on devine que dans son interview au JDD la phrase importante était celle sur ses ambitions pour la mairie de Paris - elle procède par sous-entendus, mais elle ne dit pas non... comme sur l'austérité !
La question de fond qui est posée, c'est : y a-t-il encore la possibilité en Europe pour une politique différente dès lors que l'Allemagne l'impose ?
C'est vrai que l'Allemagne dicte ses vues, mais beaucoup de pays sont d'accord pour limiter les déficits. D'ailleurs, l'argument selon lequel cette politique serait imposée par les gouvernements de droite est faux : n'oublions pas ce que les succès allemands doivent aux restructurations conduites par Gerhard Schröder, chancelier social-démocrate... Il n'empêche qu'il est curieux de voir l'Europe s'imposer de l'austérité sur la rigueur au moment où de plus en plus d'économistes dénoncent les insuffisances de cette politique. François Hollande n'a pas choisi d'être à contre-courant. Du coup, c'est toute sa politique qu'il a jetée par-dessus bord.
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