mardi 7 août 2012
L’euro ? Mieux vaut n’en pas parler…
Durant les deux dernières semaines de juillet, les taux d’emprunt de
l’Espagne et de l’Italie « qui représentent à elles seules 30% du PIB
de l’Europe » ont connu d’inquiétantes poussées de fièvre. L’onéreux
remède prescrit par les toubibs qui veillent au chevet de cette zone
cacochyme, une injection de cent milliards d’euros pour soutenir
les banques espagnoles, a fait momentanément un peu retomber la tension
des marchés financiers et boursiers. Mais l’effet du calmant à multiples
zéros est de courte durée…
Semaine après semaine la Grèce continue sa descente abyssale. Le 20
août prochain le gouvernement d’Antonoio Samara doit rembourser 3,2 milliards d’euros
d’obligations détenues par les banques centrales. Un remboursement dont
il n’a pas le premier million. L’économie grecque, exsangue depuis
maintenant quatre ans, ne donne aucun signe perceptible de redressement…
Au contraire. La récession se poursuit et les responsables grecs se
montrent toujours « aussi incapables d’engager les réformes structurelles pour se remettre à flot ».
La Grèce est dans un processus de mort lente (de son économie) dont la
phase finale se rapproche. Son maintien dans l’euro relève donc de
l’acharnement idéologico-thérapeutique. Pour grappiller quelques mois
supplémentaires sur l’inéluctable, les européens vont devoir remettre,
une fois de plus, la main à la poche. Un geste devenu répétitif, qui
menace d’en lasser plus d’un.
Depuis le week-end dernier l’Espagne, nous dit-on, « n’exclut plus de demander l’aide de l’Europe ».
Après les banques, l’Etat, dont le gouvernement espagnol, ravalant sa
fierté de conquistador, s’apprête à son tour à tendre la sébile. Et
après l’Espagne, qui ? l’Italie ? Pays dual : d’un côté l’Italie du Nord
dont l’industrie est dynamique, avec des exportations commerciales,
proportionnellement, deux fois supérieures à celles de la France. Mais
une Italie également plombée par un sud calamiteux et anarchique.
Exemple le plus emblématique, la Sicile, dont certains hommes politiques
de la Péninsule n’hésitent pas à dire qu’elle est « la Grèce de
l’Italie ». La Sicile dont le dernier déficit en date, « 5,3 milliards d’euros » vient s’ajouter à un endettement de « 21 milliards ».
La Sicile et ses « 17 995 fonctionnaires contre 3 200 par
exemple dans le Piémont ». La Sicile où sur 5 millions d’habitants « 14 400 personnes vivent aux frais des collectivités locales, dont 24 880 gardes forestiers ».
Où au siège du conseil régional, à Palerme, « 1 382 fonctionnaires –
plus qu’au 10 Downing Street à Londres – sont parfois payés 17 000 euros
par mois ». Des fonctionnaires qui peuvent faire valoir leurs droits à
la retraite « après vingt-cinq ans de service ». Aux Olympiades de la
gabegie étatique la Sicile égale la Grèce. Le clientélisme des
élus étant le mot clé de ces dérives. Si le clientélisme est un vice
inhérent au système démocratique, les pays du sud de l’Europe semblent
l’avoir poussé, sous forme de prévarication et de concussion, jusqu’à la
caricature.
Pressentie pour régler la facture de ces gaspillage stupides, fruits
le plus souvent de politiciens stipendiés, prébendiers ou incapables
(et souvent les deux à la fois), l’Allemagne se voit menacée, par
anticipation, de perdre son triple A, cette andouillette financière dont
les Agences de notation tirent la ficelle.
Et la France dans tout ça ? Des experts nous disent « qu’elle danse
sur un volcan ». Une danse de plus en plus acrobatique, où elle risque
de se casser la figure. « Certains dirigeants français sont très pessimistes.
A l’instar de François Fillon, qui ne voit pas bien comment l’Espagne
pourra remonter la pente. L’ancien Premier ministre craint un scénario
où la zone euro éclate, avec, au nord, l’Allemagne et ses satellites, au
sud, des pays qui procéderaient à des dévaluations compétitives et,
au milieu, une France complètement déstabilisée. »
La France danse sur un volcan dont l’irruption semble se
rapprocher, mais, au grand dam d’ailleurs de nos voisins et partenaires,
elle danse muettement. L’hypnotiseur Hollande n’est-il pas là
pour endormir les inquiétudes ? Et le contexte estival, renforcé par les
Jeux olympiques de Londres, favorise grandement son numéro
d’endormissement. Les Français sont actuellement sur le sable. Ils
risquent fort d’y rester après la rentrée…
New deal ? Le grand bluff…
Je profite de cet article pour citer quelques extraits d’une lettre
que m’a envoyée un lecteur (dont je n’ai malheureusement pas le nom) où
ce dernier fait une analyse très pertinente de notre situation
économique, en axant ses réflexions autour de trois hommes auxquels
certains cherchent à se référer pour nous sortir de la crise: Roosevelt, Hamilton, Kohl.
« Nous sommes confrontés à une mise en cause de la zone euro, due à
un défaut de construction, signalé dès l’origine, et que l’expérience a
confirmé. Ce vice architectural et les politiques qu’il a induites ont
généré une crise multiforme, à composantes variables, suivant les pays
(immobilière, bancaire, financière, des comptes extérieurs), révélée et
amplifiée par le collapsus international consécutif au désastre des subprimes. La France, plus spécifiquement, cumule un excès d’endettement public à un défaut de compétitivité… »
Comment s’en sortir ? « Pour dénouer cet écheveau de difficultés,
faut-il s’inspirer des expériences étrangères, notamment américaines ?
Malgré la légende dorée qui l’auréole, le New Deal n’obtint (à la
différence du docteur Schacht outre-Rhin) que de médiocres résultats
dans la relance de l’économie américaine, dont la vraie reprise date du
grand conflit mondial. Encore ces modestes avancées bénéficièrent-elles
d’une dégringolade du dollar, hors de question dans la zone euro
actuelle. Pis encore, la brutale rechute de 1938 devait alerter sur les
méfaits d’une chasse aux déficits trop vigoureuses… »
Fusionner les dettes ? Surtout pas…
« Plus avant dans le passé, on évoque Hamilton, père
fondateur, qui fit accepter la fusion des dettes des Etats (le nord
était alors menacé de défaut) en une seule dette commune, financée par
une taxe à l’échelle de l’Union. Pour conclure qu’une telle solution
implique une structure fédérale, qu’aucun des partenaires de la zone
euro n’est prêt à accepter, y compris l’Allemagne et sa Cour
constitutionnelle… »
L’Allemagne, où certains cherchent également un modèle de transfert. « Pourrait comparaître enfin une troisième figure celle du chancelier Kohl, qui imposa une union de transfert entre les deux Allemagne, des plus riches vers les moins dotés, jusqu’à un minimum d’égalisation.
De ce genre d’opération les exemples réussis, malheureusement,
n’abondent pas, même entre nationaux d’un même pays. Et il n’est guère
vraisemblable que les Allemands accepteraient de renouveler pour
d’autres une expérience si ardue et si péniblement coûteuse. »
L’inévitable retour des monnaies nationales
Conclusion : « Donc nous irons de ravaudage en ravaudage (…) en
colmatant les brèches les plus graves. Feignant de croire à une
évolution asymétrique des économies partenaires (légère inflation ici,
déflation là, qui les rendraient plus convergentes). A moins qu’à
l’ éclatement de la zone euro, on finisse par préférer une
transformation de l’union monétaire avec cohabitation de l’euro et de
monnaies nationales, solution qu’on pourrait étudier calmement, car les
modalités n’en sont pas nécessairement catastrophiques et
dévastatrices. »
C’est sans doute en effet la solution la plus sage et la plus
pratique. Celle que nous imposeront les faits (lorque nous serons le dos
au mur ?) et qui aurait dû être envisagée dès le début de la crise.
Mais pour l’instant les dirigeants européens lui tournent toujours le
dos, préférant agiter leurs chimères dans les impasses et les
culs-de-sac si clairement évoquées ci-dessus par notre perspicace
correspondant…
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