mardi 7 août 2012
Londres et la lumière
usain Bolt n’est pas anglais. Il eût sinon mérité d’être anobli. Pas
uniquement parce qu’il est le fanfaron le plus rapide du monde. Par son
opportun coup d’éclat au 100m, le Jamaïcain a accompli cette
performance: il a éclipsé des épisodes embarrassants pour la nation
organisatrice.
D’abord, l’escroquerie avouée d’un pistard
britannique qui s’est laissé tomber pour biaiser la compétition. Et puis
cet autre coup de théâtre en aviron. Un équipage anglais mal parti
excipe d’une casse, répare au tournevis, obtient un nouveau départ et
gagne.
Messieurs les Anglais, trichez les premiers? Sans la
diversion Bolt, ce genre de péripéties aurait peut-être pu entamer le
mythe du fair-play anglais. Mais la tornade jaune a laissé dans le vent
aigreurs et rancunes. Rappelant que la dramaturgie olympique se nourrit
de la valeur suprême qu’incarne le spectacle.
À quiconque ne
verrait dans ces jeux qu’étalage de muscles et de hargne, il faut
d’ailleurs opposer la portée symbolique, morale presque, d’images
dépassant la simple apologie de la performance: un médaillé d’or sautant
dans les bras (au sens propre) de son dauphin, un coureur avec des
prothèses en demi-finale, des athlètes syriens bousculés par le
maelström londonien.
Conan Doyle lui-même avait été frappé de
l’universalité d’un scénario où l’humain tient la vedette, avec ses bons
et ses mauvais côtés. Aujourd’hui, dans un Londres rhabillé pour partie
de neuf, dans une Angleterre réduite à en payer la facture fiscale, ces
JO oscillent comme il se doit entre le sublime et le mesquin, l’idéal
affiché et les tricheries glissées sous le tapis.
La flamme
éteinte, il restera de la fête de très voyants vestiges immobiliers, des
records à merchandiser, des souvenirs de champions avec logo
d’équipementier apparent et drapeau national brandi. Subsistera,
accessoirement, le sport dans sa splendeur et sa contemporanéité, dans
ses ombres et dans sa lumière.
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