TOUT EST DIT

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lundi 6 août 2012

Les glaces Amorino, c’est bon et basta !

Qui l’eût cru ? Ce glacier au nom italien est une invention française. Ses deux fondateurs, Cristiano Sereni et Paolo Benassi, originaires d’Emilie-Romagne, cherchaient à retrouver le goût des «gelati» à Paris. Ils y ont ajouté une bonne dose de marketing…
Pour Philippe Terriere, la révélation a eu un goût de citron. Il y a cinq ans, cet ancien de Publicis arpentait les allées du Salon de la franchise de Paris, quand deux représentants du glacier Amorino lui ont tendu un cornet en guise de prospectus. «Le parfum ? Je m’en souviens parfaitement : “limone femminelo di Sorrento” (une variété du golfe napolitain).» Bluffé par le goût, il file observer de plus près une boutique de l’enseigne, à deux pas de la Seine. Deuxième choc de la journée. «Il y avait 30 mètres de queue. J’ai sorti ma calculette, le glacier devait encaisser 700 euros par heure.» C’est décidé : il lâche tout pour ouvrir une franchise à Cassis, près de Marseille. «600.000 euros de chiffre d’affaires par an, lâche-t-il avec gourmandise. Comme quoi, je ne m’étais pas trompé.»
Voilà le genre d’histoire qui fait fondre de plaisir Cristiano Sereni, le P-DG d’Amorino (le nom italien du dieu Cupidon). Derrière sa mèche impeccable et sa détermination de condottiere, ce play-boy transalpin de 42 ans a inventé un concept en or : la glace italienne made in France. Le client se croit dans une «gelateria» romaine, mais toutes les glaces sont élaborées dans un laboratoire de 8.000 mètres carrés installé à Orly, en banlieue parisienne. Résultat : en moins de dix ans, la chaîne a ouvert 81 boutiques, dont 52 dans l’Hexagone – et à peine trois en Italie ! Pour devenir franchisé, chaque impétrant doit payer un ticket d’entrée de 200.000 euros, puis dépenser à peu près autant en investissements divers la première année. Mais le patron vous le jure dans un français parfait : avec 500.000 euros de recettes par an et une marge de 25%, un Amorino est amorti au bout d’un quinquennat. Du coup, le réseau affiche un chiffre d’affaires de 24 millions pour 2011, deux fois plus qu’il y a quatre ans. «En comptant les magasins à l’étranger, nous en aurons 90 début 2013», glisse 
le boss entre deux voyages à Hong Kong et Dubaï.
Pas de colorant, ni d'arôme de synthèse ici. Tout est 100% naturel
Un givré, ce nouveau glacier ? Seule certitude : depuis qu’il est arrivé en France à l’âge de 24 ans pour suivre sa petite amie, devenue par la suite son épouse, ce diplômé de l’université de Bologne n’a jamais eu froid aux yeux. A la fin des années 1990, avec 300.000 francs avancés par un banquier, c’est lui qui avait lancé Cinebank, ces fameux distributeurs automatiques de cassettes vidéo. «Il y en avait partout en Italie, alors j’ai répliqué l’idée», résume-t-il. Surtout, le jeune homme eut la riche idée de revendre l’entreprise au géant Video Futur en 2002, avant que le téléchargement sur Internet n’emporte tout le secteur sur son passage. On parle d’un chèque à cinq zéros ? Il élude. «Je ne vous donnerai pas le montant, mais on faisait 50 millions de chiffre d’affaires», concède-
t-il. Une fois le compte en banque bien garni, ce passionné de Ferrari se demande alors ce qui lui manque à Paris pour mener la dolce vita, la vraie. Réponse : une glace. Ou plutôt une «gelato». Avec un ami d’enfance, Paolo Benassi, débauché de la direction financière de Max Mara, il décide alors de monter sa propre échoppe. «Paolo est retourné plusieurs mois en Italie pour apprendre le métier, puis on s’est installés sur l’île Saint-Louis, à Paris, juste en face du célèbre Berthillon», raconte-t-il. La suite tient en une idée simple : ne rien faire comme les Häagen-
Ça commence par le choix des ingrédients. Tous les experts ès cornets deux boules vous le diront : une bonne glace, c’est avant tout des choses simples (du lait et des œufs frais) turbinées avec les fruits du moment. Moyennant quoi, les deux acolytes se targuent de ne sélectionner que le meilleur. Les concurrents plébiscitent la mangue péruvienne bon marché ? Eux ne prennent que de l’alfonso, une variété indienne 30% plus chère. Les framboises premier choix ne sont disponibles qu’entre avril et septembre ? Ils ne proposent pas 
ce parfum au-delà de cette période. Quant aux pistaches, les deux dirigeants en ont testé trois sortes – la syrienne, la californienne et la turque – avant de craquer pour la sicilienne, la fameuse pistache de Bronte. Pas donnée, certes. «Mais on sent la différence», assurent-ils, en expliquant leur méthode pour contrôler les coûts d’achat : «Parfois, nous négocions directement avec le producteur. Impossible, sinon, d’avoir des poires non pasteurisées, fraîches et mûres chez un grossiste.» Et ne leur parlez pas des colorants flashy et des arômes de synthèse, utilisés par les industriels. «Chez nous, même les conservateurs sont d’origine naturelle.»
Deuxième force d’Amorino : un marketing sur mesure pour vous transporter devant le Colisée en deux lippées. Dans ses boutiques aux teintes tabac – les concurrents donnent dans le blanc immaculé – tous les noms de parfums sont en italien dans le texte. Pour commander celui à la noisette, il faut demander la «nocciola tonda e gentile» ; la fraise s’appelle «fragola» ; et le «cioccolato senza latte» désigne le chocolat noir. «On nous apprend à prononcer chaque parfum avec l’accent de là-bas», sourit un vendeur d’ici. Dans les centres commerciaux, Amorino va jusqu’à monter des stands en forme de camionnette de glacier à l’ancienne signée Vespa. Rétro et «veramente italiano», vous dit-on.
Mais comme Lille ne se situe pas au sud de la Sardaigne, les deux associés doivent aussi y faire oublier le mauvais temps qui sévit six mois par an. Leur idée : transformer le glacier en salon de thé pendant la basse saison. Depuis 2005, les boutiques Amorino proposent force chocolats chauds et cafés gourmands – pardon, «caffè goloso» – accompagnés de panettone et de confiseries. Des produits importés d’Italie cette fois, qui représentent un quart du chiffre d’affaires. «En plus, ça nous a ramené des clients qui ne connaissaient pas nos glaces», se réjouit Cristiano Sereni.
Dernière clé du succès : un réseau de franchisés sous contrôle. Fini, le temps où les dirigeants se faisaient escroquer de plusieurs centaines de milliers d’euros en Chine, en pensant racheter le nom d’Amorino à un aigrefin qui disait l’avoir déposé. Aujourd’hui, les principales boutiques de l’enseigne sont dirigées par des anciens de Cinebank ou des parents. Comme celles implantées en Italie, dont le patron n’est autre que le beau-frère de Sereni. «Il y a un côté clanique, c’est vrai, mais dans le bon sens du terme», s’amuse Philippe Terriere. Ah, la «famiglia»…Dazs et autres géants du secteur. 

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