lundi 19 mars 2012
Le pouvoir moral
Président de la République en Allemagne, une fonction essentiellement protocolaire ? Oui, dans le courant normal de la vie politique dominée par la chancellerie, le Bundestag et les Länder. Mais le président fédéral détient de vraies prérogatives lors d’une crise parlementaire. Il peut aussi refuser de décréter des lois votées, déjà huit fois depuis que la RFA existe. Surtout, le chef de l’Etat dispose du pouvoir moral, si important outre-Rhin… et difficile à expliquer en France.
Ainsi, la démission pour malversations présumées de Christian Wulff le mois dernier, après celle de Horst Köhler en mai 2010, avait créé un vide constitutionnel. Un désarroi certain, aussi, exprimé à longueur de colonnes dans la presse. Comme si le « Bundespräsident », pourtant largement ignoré ailleurs en Europe où on ne connaît que la chancelière Merkel, était un personnage-clé de la vie publique. Non parce qu’il incarnerait l’Allemagne, plutôt parce qu’il est placé au-dessus de la politique du quotidien, transcendant en quelque sorte l’intendance politicienne dans un rôle de débonnaire « chef de famille » aux relents de monarchie nordique, tout en jouissant d’une liberté d’esprit et de parole pour les questions touchant à la société. Par exemple, en critiquant, le cas échéant, la chancellerie et les partis politiques. Or ces remontrances constitutionnelles ou sociétales, toujours publiques, portent leurs fruits dans la population, et par ricochet, chez les élus. Du moins, quand le président fédéral assume pleinement son rôle, quand il ne prend pas sa résidence du Palais Bellevue pour une « cage dorée » à destination d’hommes politiques « placardisés ».
Ce ne sera pas le cas de Joachim Gauck, membre d’aucun parti. L’ex-pasteur et inlassable prédicateur est connu pour son franc-parler. Quitte à commettre quelques impairs en apportant son soutien au banquier Thilo Sarrazin dans ses critiques sur la place de l’islam ou en désapprouvant ouvertement les manifestations à l’allemande du mouvement « Occupy Wall Street ».
Comme Angela Merkel, Joachim Gauck est originaire de l’ex-RDA, un régime que lui – contrairement à la chancelière – a vraiment combattu. Comme Angela Merkel, il porte ses attentions à l’Europe de l’Est. Juste après son intronisation, il se rendra en Pologne pour renforcer les liens de voisinage. Un symbole ?
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