samedi 11 février 2012
Humaniser les prisons
« Quand je suis arrivé à la nouvelle prison toute neuve, j'ai vu ces murs blancs, la douche en cellule, je me suis dit : c'est le paradis » (1). Il est certain que les établissements construits ces dernières années sont plus lumineux, plus spacieux, mieux équipés que les vieilles prisons. Malheureusement, de nombreux problèmes sont vite apparus : l'éloignement de l'établissement à la périphérie des villes, ou plus loin encore, complique les visites des familles.
Il y a plus grave, signalé par les prisonniers, les personnels pénitentiaires et les autorités : une déshumanisation qui tend à annuler les progrès réalisés dans les constructions neuves. En effet, l'organisation, les moyens modernes de la sécurité entravent les relations. Ainsi, derrière les glaces sans tain des postes de surveillance, on ne peut croiser aucun regard ni savoir quelle personne vous observe. Certaines dispositions des grillages aux fenêtres laissent passer la lumière, mais empêchent toute vue sur l'extérieur. Le prisonnier ne verra même plus la couleur du ciel.
Cet isolement renforcé de fait par la nature même de l'architecture rend la vie plus difficile pour les détenus certes, mais aussi pour les surveillants. Ne nous étonnons pas alors de voir monter cette agressivité dénoncée par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, M. Jean-Marie Delarue.
« Le confort, on peut s'en passer, mais on ne peut pas se passer de contacts », disait une personne détenue à la prison nouvelle de Rennes-Vezin... « La vie sociale des personnes détenues est la grande oubliée des nouveaux chantiers pénitentiaires appelés à se poursuivre les prochaines années. » (1).
Diminuer les misesen détention
Tout cela risque de rendre plus difficiles les réinsertions. C'est pourquoi il faut saluer tous les efforts conduits en ce domaine, souvent par des bénévoles, comme ceux que nous évoquions, dans Ouest-France du 7 février 2012, à la maison d'arrêt de Saint-Brieuc. Là, des formateurs convaincus et des patrons retraités s'emploient à la réinsertion et de jeunes détenus s'évertuent à en profiter. Les associations Préface et ECTI (2) travaillent avec le soutien de la maison d'arrêt et le service pénitentiaire d'insertion. Sur 63 détenus pris en charge, 64 % d'entre eux ont un travail ou une solide formation, avec zéro récidive. « Vous m'avez donné confiance en des choses que je n'imaginais pas avoir en moi », déclare un détenu.
Ouest-France, qui distribue des journaux dans les 3 000 cellules des prisons de l'Ouest, se réjouit aussi de l'accueil qui lui est réservé et du service ainsi rendu. Un prisonnier au centre de détention de Nantes nous écrit : « Merci pour le journal que vous nous donnez. Il nous permet de rester en lien avec la société. J'y trouve beaucoup d'informations utiles pour mes cours par correspondance à l'Université. Je garde tous les commentaires et les éditoriaux. Grâce à l'information locale, je peux demander à assister à des réunions et débats extérieurs avec des permissions d'une demi-journée. Ceci me permet de bien préparer ma demande de libération conditionnelle. »
Tout cela démontre que la réinsertion doit être le premier objectif. C'est indispensable. Par ailleurs, plutôt que d'augmenter le nombre des détenus, mieux vaudrait suivre l'exemple de la Finlande qui a multiplié les alternatives à l'incarcération et raccourci la durée des peines. Soulignons que la criminalité n'a nullement explosé.
Voilà un important sujet de société qu'on aimerait voir traiter par les candidats à la présidence de la République française.
(1) Revue Esprit, février 2012.
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