En tant que ministre française de l’Economie, puis pendant sa campagne, celle qui devient la première directrice générale du Fonds monétaire international a plaidé pour un «libéralisme tempéré».
«Le libéralisme est une affaire de règles bien appliquées», aime-t-elle aussi théoriser.
Selon un ancien collaborateur à Bercy, Christine Lagarde se situe à mi-chemin entre les défenseurs d’une dérégulation totale et ceux d’une économie ultra-réglementée.
«Sa vision a gagné du poids avec la crise. Elle garde un certain recul sur le modèle américain, qu’elle connaît bien et auquel elle adhère en grande partie», dit-il.
L’ex-avocate d’affaires n’a pas de formation académique en économie. Certains voient là sa principale faiblesse, au moment où elle devient le médecin et le gendarme d’une économie mondiale convalescente.
«Elle n’a pas vraiment une capacité autonome de réflexion sur ces questions», estime Charles Wiplosz, directeur du Centre international d’études monétaires et bancaires de Genève.
A ses yeux, ce n’est pas un défaut: «Christine Lagarde a une capacité remarquable à absorber ce que son staff lui dit et un talent unique pour le vendre à qui il faut. C’est très bien pour le FMI.»
«Fine diplomate»
«Fine diplomate» et «négociatrice incroyable» sont des qualificatifs qui mettent tout le monde d’accord, y compris ses détracteurs, lorsqu’il s’agit de décrire la Française.
«Une de ses grandes qualités consiste à trouver des consensus là où ça paraissait impossible», explique Agnès Bénassy-Quéré, directrice du Centre français d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii).
Christine Lagarde va donc surtout s’appuyer sur les équipes «très qualifiées» du Fonds qui, relève Charles Wyplosz, «ont pour l’essentiel été mises en place par Dominique Strauss-Kahn».
Si le patron démissionnaire a infléchi la doctrine de l’institution de Washington, lors de la crise, en faveur d’une intervention publique accrue, Christine Lagarde devrait donc suivre ses pas.
«J’ai le sentiment qu’elle poursuivra les réformes entreprises, elle a l’autorité nécessaire», confirme Eswar Prasad, économiste à la Brookings Institution.
D’autant qu’avec la crise, «les différences dogmatiques se sont beaucoup atténuées», souligne Agnès Bénassy-Quéré, le gouvernement de droite dont Christine Lagarde était membre en France s’étant distingué par «une intervention très forte de l’Etat pour relancer l’économie».
Sa déclaration de candidature résume ses positions: elle n’annonce pas de révolution mais entend «renforcer» la «légitimité» du FMI, avec une meilleure représentation des puissances émergentes, son «efficacité», notamment en matière de «surveillance» des déséquilibres mondiaux, et enfin «sa capacité à répondre aux besoins des pays membres».
«Elle devra gagner la confiance des pays émergents en mettant en oeuvre les réformes de son prédécesseur et en allant plus loin», prévient Eswar Prasad. La marge de manoeuvre est étroite, car il lui faudra «convaincre les Européens» au moment où, avec la sortie de crise, «l’élan réformateur faiblit».
Sur la régulation, les flux de capitaux ou le système monétaire, le FMI et la présidence française du G20, incarnée jusqu’ici par Christine Lagarde, sont plus ou moins au diapason.
Mais c’est le dossier brûlant de la crise de la dette en Europe qui l’attend dès sa prise de fonctions. Alors que le Fonds est en première ligne en Grèce, celle qui revendique «un rôle clé» joué en tant que ministre écarte tout risque de «bienveillance» vis-à-vis de la zone euro.
Selon Charles Wyplosz, la Française devrait «prendre ses distances par rapport aux Européens», justement pour faire oublier ses origines à des pays émergents agacés de voire l’Europe monopoliser la direction du FMI. «Beaucoup trouvent que la zone euro n’a pas bien géré la crise de la dette», relève-t-il.
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