La France a donc une fois de plus rendez-vous avec sa propre histoire, celle des grèves. La journée noire de demain, et celles qui suivront peut-être, illustre un durcissement du bras de fer très prévisible. Non pas que ceux qui relèvent le défi en payant de leur poche se jettent par plaisir dans l'aventure. Ils y sont poussés par les échecs répétés de ce fameux dialogue social à la française qui fait passer la recherche du consensus après d'autres visées, souvent politiques. Point de passage obligé de tout conflit, les grèves font ainsi partie de notre identité.
Aucun président de la Ve République n'a été privé de ces Journées du patrimoine social. Le général de Gaulle, en 1963, a eu droit à 38 jours de grève des mineurs. Après Valéry Giscard d'Estaing et François Mitterrand, Jacques Chirac a lui aussi dû reculer, soit comme premier ministre tétanisé en 1986 par la mort de l'étudiant Malik Oussekine, soit comme président contraint de souffrir avec ses premiers ministres carbonisés sur des dossiers toujours d'actualité : la rigueur et les retraites pour Juppé en 95 ; l'éducation pour Raffarin et Fillon en 2003, puis Villepin en 2006.
Nicolas Sarkozy connaît bien cette histoire. Il n'a pas été pour rien dans la mise à mort du CPE en 2006, sous? Villepin. Président, il a lui-même évité de prendre de front les lycéens pour faire passer en priorité la réforme des universités, selon l'adage chiraquien qui n'a pourtant pas toujours réussi à son auteur : « une haie à la fois ». Le voici donc devant celle des retraites qu'il a décidé de sauter en force.
Le déclenchement de grèves reconductibles fait entrer le pays dans une zone d'incertitudes. Le président mise sur sa volonté, sur sa capacité manoeuvrière et sur l'état des forces du front syndical. Les dirigeants des grandes centrales sont eux aussi déterminés mais ils savent que leurs marges de manoeuvre a des limites. Dès lors que la réforme a pour l'essentiel été votée, les grévistes peuvent douter du résultat de grèves à répétition, douloureuses pour leur portefeuille et moins appréciées de l'opinion. On entre dans une semaine à risques en sachant que les comptes se solderont plus tard.
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