TOUT EST DIT

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lundi 5 juillet 2010

Coup de chaud

Ça ne sentirait pas un peu le brûlé, là ? Deux fusibles ont fondu, en tout cas, et il flotte comme un léger parfum de panique dans la maison Sarkozy. Les conditions dans lesquelles les démissions forcées d'Alain Joyandet et Christian Blanc sont intervenues hier ont plus d'importance finalement que le licenciement sec des deux sous-ministres. Ce qui frappe, c'est la fébrilité qui les caractérise. Comme si le président de la République avait été soudain saisi par l'urgence de faire des exemples pour calmer la colère du peuple. Il y a quelques jours encore, le chef de l'État évoquait un remaniement en octobre avec une sanction annoncée pour certains membres du gouvernement coupables de mauvais « comportements ». Et voilà qu'en une seule journée tout s'est accéléré. Devant l'incompréhension de l'opinion, il fallait des victimes expiatoires ! Vite. Tout de suite. Alors on a choisi les deux mauvais élèves les plus caricaturaux : le premier avait dépensé pour 12.000 euros de cigares, le second voulait trafiquer son permis de construire. Train de vie choquant, passe-droit insultant pour le droit : leurs comptes étaient bons. Pour les autres, Fadela Amara et Rama Yade, cela pouvait attendre. Leurs fautes semblaient moins nettes, moins vénales, moins symboliques. Cette hiérarchie des vices ajoute un peu plus à l'inédit d'une situation qui s'apparente à un scénario pour République bananière. Comment le chef de l'État peut-il imaginer une seule seconde que ce coup de balai express et sélectif un dimanche d'été suffira à éteindre l'impression de scandale qui, jour après jour, étend un nuage de plus en plus épais autour de l'équipe au pouvoir ? Non seulement cette précipitation ne réglera rien, mais elle risque surtout d'aggraver le malaise qu'elle prétendait dissiper. En jouant petit bras, et à contretemps, l'Élysée et Matignon viennent de commettre une double faute. Si le débarquement de Joyandet et Blanc visait à faire oublier l'affaire Woerth, et à faire retomber la pression, c'est raté. Ce coup de tonnerre dans le ciel bleu de juillet où l'information politique commençait à fondre au soleil des vacances expose un peu plus le ministre du Travail aux rayons de l'amalgame. Le voilà mis sur le même plan que ses grossiers homologues. Livré, pour le coup, aux crocs d'une presse suffisamment sur les dents pour se demander pourquoi il bénéficie d'un soutien aussi spectaculaire et surtout aussi risqué. Ce n'est plus une protection, mais une compromission, et elle lie un peu plus encore le président à son ministre. Ce matin, on se demande encore quel est l'étrange calcul de Nicolas Sarkozy tant il échappe à toutes les équations politiques prévisibles. Un coup de chaud ?

Olivier Picard

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