"Au réveil, je suis allé sur le site du New York Times, écrit Richard Kim, du site de gauche progressiste The Nation, et j'ai cru que j'étais en fait sur le site The Onion [un site satirique, ndlr]", à propos de l'attribution, vendredi 9 octobre, du prix Nobel de la paix à Barack Obama. "Je ferais mieux de refermer les yeux et de me réveiller dans la réalité", poursuit-il.
Pourtant, ce n'est pas un rêve. Barack Obama a bien été désigné par le comité Nobel, et "quiconque pense que ce prix est sans précédent, n'avait pas bien fait attention auparavant", défend Robert Naiman, de Common Dreams. Le site de gauche est un des rares à défendre ce prix récompensant les promesses et les efforts du président américain. Pour lui, c'est de la même manière que Desmond Tutu avait reçu, en 1984, le prix avant que l'apartheid ne soit totalement éradiqué d'Afrique du Sud. Ce prix l'avait justement aidé à accomplir cette tâche. "C'est ce que le comité Nobel essaie de faire pour Obama", conclut Robert Naiman.
Mais la voix de Common Dreams semble bien seule dans le concert de commentaires étonnés. Massimo Calabresi de l'hebdomadaire Time y voit une "accolade prématurée, d'ordinaire réservée à ceux qui ont atteint des résultats considérables et tangibles dans la poursuite de la paix". "Ces résultats considérables", l'ensemble de la presse américaine souligne que M. Obama ne les a pas encore accomplis. Pour Andrew Leonard, du site Internet Salon, "Barack Obama tente de construire un système de soins, de réparer la machine économique, de prévenir le réchauffement climatique sans oublier de sortir les troupes d'Irak et de trouver une solution au conflit afghan. S'il réussit tout cela, il méritera un prix. Mais certainement pas encore". Un chroniqueur de Slate, John Dickerson, note ironiquement qu'après avoir perdu les Jeux olympiques, vendredi 2 octobre, et avoir remporté le Nobel, vendredi 9, Barack Obama "devrait garder un créneau libre dans son agenda vendredi prochain, car apparemment tout peut arriver".
LES CONSERVATEUR TRÈS CRITIQUES
Les éditorialistes conservateurs vont plus loin dans leur critique de ce prix. Mark Halperin, qui tient le blog politique du Time, The Page, explique : "Les personnes critiques envers Barack Obama l'accusent depuis longtemps de se contenter de discourir (…). Cette incroyable décision de lui attribuer le Nobel simplement sur sa rhétorique va rendre plus furieux ses détracteurs qu'elle ne va contenter ses supporteurs."
En effet, Glen Greenwald, sur Salon, estime que le comité Nobel s'est "ridiculisé". Les éditorialistes du conservateur Weekly Standard s'en donnent à cœur joie, remerciant le Comité, qui leur épargne ainsi des difficultés pour trouver leurs blagues de la semaine. Plus sérieusement, l'un d'eux fait remarquer qu'au moment des nominations pour le Nobel Barack Obama n'était à la Maison Blanche que depuis onze jours. "En 2010, note Jennyfer Robin, de Commentarymagazine.com, le prix ira à Mahmoud Ahmadinejad pour avoir accepté de s'asseoir à la table des négociations."
Mickey Kaus, de Slate, avait bien un conseil à donner à Barack Obama : "Qu'il ne l'accepte pas ! Qu'il refuse poliment. Qu'il dise être honoré, mais qu'il n'a pas encore eu le temps d'accomplir les tâches qu'il souhaite. Résultat : il obtient tout de même la gloire venant de la récompense et fait un pas vers la résolution de son problème narcissique." Mais Barack Obama a déjà annoncé qu'il irait en personne recevoir son prix à Oslo.
Antonin Sabot
vendredi 9 octobre 2009
Nobel : la presse américaine dénonce un prix "prématuré"
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire