dimanche 18 janvier 2015
Les étrangetés de l’air du temps
Une semaine après les attentats terroristes qui ont ensanglanté Paris, l’air du temps a quelque chose d’étrange, d’extrêmement lourd, chargé d’incongruités. « Et vous, êtes-vous Charlie? » devient la question rituelle de tous les interviews, radio, presse, télévision.
Ne pas être Charlie revient à se singulariser, ringardiser, se placer à contre-courant, endosser une image douteuse. Nous assistons à un curieux basculement, qui voit le chantre de l’anticonformisme et de la contestation par l’humour devenir un label de convenance. Ses créateurs auraient-ils apprécié? Qui peut le dire? Hier matin dans le bus qui m’emmenait à mon travail, j’entendais cette histoire d’un homme d’une trentaine d’années, ayant fait la queue devant le kiosque à journaux dès 5 heures du matin, pour acheter un stock d’exemplaires et les revendre plusieurs fois leur prix au marché noir. La « récup », c’est maintenant… Et puis, en vertu de l’union sacrée, un silence pesant écrase le pays. Pour qui se souvient des suites de l’affaire Mehra en mars 2012, l’absence aujourd’hui de toute polémique, de toute discussion, voire velléité de questionnement sur les failles éventuelles de la puissance publique dans ce bain de sang, a quelque chose de sidérant. Souvenons nous de la mise en cause violente du président de l’époque, de son ministre de l’Intérieur, des services de renseignement. Le silence aujourd’hui, l’Omerta qui règne est invraisemblable. On sait que les médias sont largement acquis au pouvoir actuel, à 80%. Oui, mais là, c’est grave car ce genre de questions fait partie de la démocratie. L’union nationale, même sous la Grande Guerre de 1914-1918, n’a jamais interdit de légitimes interrogations sur la conduite des opérations, qui s’exprimaient alors à la Chambre. Mais il y a plus grave. Certes ce drame a profondément traumatisé la France. Mais il ne donne pas lieu, sauf exception, au débat de société qui devrait s’imposer. Il soulève à mes yeux des questions fondamentales de civilisation sur l’échec du monde occidental face à l’islamisme radical, le séisme planétaire que représente l’instauration de l’Etat islamique d’Irak (daesh) et l’impuissance du monde occidental, le désastre engendré dans les sociétés européennes par le modèle communautariste et le repli identitaire, l’effroyable chaos des « cités de non droit », largement occulté et ignoré par « la France d’en haut », la fragmentation de la société française qui remonte à des décennies et ne fait que s’aggraver, sa violence, verbale, physique, le déclin de l’autorité, au sens noble du terme, et de la solidarité nationale – le lien de fraternité. Le silence qui pèse sur ces sujets fondamentaux, tenant à la conception même du monde, de la société et de son Etat, ses orientations et son devenir, ne fait qu’aggraver la tension perceptible en ce moment, le désarroi général et le sentiment de fatalisme.
NB: je remercie par avance les auteurs de commentaires, et je demande à certains de bien vouloir comprendre qu’un modeste blog d’échanges et de réflexion partagée comme celui-ci, n’a pas vocation à héberger des propos partisans ou de propagande en faveur de personnalités ou de partis, et encore moins des déclarations fustigeant des personnes, des groupes de personnes. Des mots déplacés ou scandaleux auraient pour effet immédiat de m’obliger à mettre fin à ce blog dont je suis personnellement responsable du contenu. Or, il est ma créature de quatre années, reçoit désormais 1000 à 2000 visites chaque jour; j’y tiens beaucoup, et je le protègerai jusqu’au bout en empêchant ce genre de dérapages. C’est ainsi. La « toile » est vaste et il existe de multiples blogs ou sites se prêtant mieux au défoulement des passions. Sincèrement, merci de votre compréhension.
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