Tous les opposants de gauche au président socialiste – et même
quelques alliés – se trouvaient ces derniers jours rassemblés dans la
campagne nantaise. Bottes en caoutchouc fraîchement acquises aux pieds,
tournevis à la main et n’écoutant que leur courage, ils ont libéré des
maisons aux portes et aux fenêtres condamnées par les expropriateurs.
Le Larzac de M. Jean-Marc Ayrault s’appelle Notre-Dame-des-Landes.
Depuis quarante ans, des opposants refusent l’implantation d’un
aéroport, à une vingtaine de kilomètres au nord de Nantes. Malgré cette
opposition, les élus ne renoncent pas à un projet qu’ils jugent
indispensable, en raison de l’augmentation du trafic aérien.
Le
débarquement de chefs vendredi et de manifestants hier était destiné à
montrer au chef de l’État et à son Premier ministre qu’ils ont bel et
bien une opposition à leur gauche, et qu’elle entend prendre toute sa
place. Celle qui a davantage voté contre Nicolas Sarkozy que pour
François Hollande retrouve ses vieux réflexes. Le programme du président
de la République n’a rien à voir avec son combat.
Ces gauches,
finalement, ne se retrouvent qu’au moment des élections. Pour le reste, à
peu près tout les sépare. La gauche de la gauche est elle-même
constituée de chapelles qui s’écharpent régulièrement, mais qui
cherchent de temps à autre la cause qui les réunira, le refus qui les
rapprochera. François Hollande se demande avec inquiétude si
Notre-Dame-des-Landes sera l’un de ces ciments.
Au départ, la
cause est écologique. Les Verts, qu’ils soient politiques ou bucoliques,
sont présents depuis le début, mais bientôt renforcés par des militants
altermondialistes et anarchistes, et rejoints désormais par des
dirigeants du Parti de gauche ou du NPA. Il y a de la tactique dans ce
rassemblement (être plus forts pour s’opposer à la gauche de
gouvernement), mais aussi convergences des luttes.
Dans cet
aéroport qui n’arrive pas à se faire, qu’on empêche de sortir de terre
pour ne pas en ravager un bout, il y a le rejet de la vitesse, qui brûle
et pollue ; la remise en cause de voyages éclairs qui n’apportent rien,
d’échanges de marchandises dont on pourrait se passer ; la négation
d’une interconnexion planétaire qui se nourrit de croissance à tout prix
; le refus d’un monde plein de bruit et de fureur.
Sous ces
allures modernes, le conflit autour de Notre-Dame-des-Landes est la
répétition de contradictions anciennes. D’un côté une gauche réformiste
qui accepte l’épreuve de gouvernement, s’arrange un peu avec sa
doctrine, mais se confronte au réel et le fait bouger. De l’autre une
gauche qui ne transige pas avec la réalité et voudrait la soumettre
entièrement, et reste prudemment éloignée d’un pouvoir à l’exercice
duquel sa pureté ne résisterait pas.
dimanche 18 novembre 2012
La guerre des gauches continue
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