TOUT EST DIT

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samedi 5 février 2011

Qui va récupérer la Révolution du Jasmin?


Depuis le départ du président Ben Ali, tout le monde s’extasie sur les révolutionnaires pacifiques qui ont renversé avec l’arme du Net une dictature corrompue. Mais il convient de rester prudent. Car la question est de savoir qui va récupérer la révolution tunisienne. En fait, les révolutions "douces" sont inconcevables dans les vraies dictatures où la liberté de circulation, l’accès à l’éducation et l’armée sont totalement sous contrôle. Paradoxalement, si cela a été possible en Tunisie, c’est parce qu’il s’agissait du pays arabe le plus ouvert et évolué, le « moins » totalitaire, et parce que l’armée n’a pas obéi au despote.
Certes, la menace islamiste a trop souvent servi de prétexte pour réprimer l’opposition. Mais il ne faut pas sous-estimer les mouvements islamistes comme Ennahda en Tunisie, dont le leader Rachid Ghannouci, qui va rentrer bientôt de Londres, veut rafler la mise. Souvenons-nous de Khomeiny qui vola la révolution aux communistes, aux islamo-gauchistes et aux nationalistes en 1979. Habilement, Ghannouci se réfère au Parti de la Justice et du Développement (AKP) turc qui a démantelé les forces laïques au nom de la « démocratie »... Ce discours est également cher aux Frères musulmans égyptiens. En fait, le chaos qui s’installe à Tunis, le discours revanchard diabolisant la France "complice » du dictateur, puis l’appel à faire du passé table rase, sont inquiétants. Certains signes ne trompent pas : appel aux prières à la télévision; retour des filles voilées dans les universités et des intégristes dans les mosquées, etc. Certes, Ennahda dit qu’il ne touchera pas au statut de la femme tunisienne, unique en pays arabe. Mais comme l’explique le philosophe tunisien Mezri Haddad, ancien ambassadeur à l’Unesco, les islamistes ne vont pas s’accaparer le pouvoir tout de suite. Ils ont appris des erreurs du FIS algérien en 1990. Ils tenteront d’utiliser leurs pions de gauche et d’extrême gauche : Marzouki, Hamma Hammami, barreau des avocats ; (où ils ont des sympathisants), Ligue tunisienne des droits de l’homme. Ennahda veut rassurer en ne participant qu’aux élections législatives (comme jadis le FIS en Algérie ou les Frères musulmans en Egypte), et assurant ne pas toucher aux acquis de la femme. Mais des voix réclament le jugement du régime tunisien depuis 1956, c’est-à-dire depuis Habib Bourguiba, celui qui a libéré la femme et interdit la charià… Pendant ce temps, Al-Jazira, la télé arabe la plus populaire, et son prédicateur-vedette, le salafiste Al-Qardaoui, conspuent la Tunisie moderne et laïque sur les écrans. L’opposition laïque est elle consciente du danger ?

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