Le vert est délavé et c’est une régression dans ce printemps pluvieux, comme si au doigt mouillé on décrétait le danger écarté et nous ne mourrons plus, ni de chaleur ni de fonte des glaces, et le climat ne va pas resserrer ses griffes - il nous épargnera, le climat, il n’abusera pas de notre impuissance?
Le succès de Claude Allègre et de ses alliés, ce jeu des médias que tout nourrit, le désarroi des scientifiques etl’apathie de l’opinion, tout cela laisse rêveur. Il y a moins d’un an la France communiait devant Home, nous étions le plus conscientisé des pays occidentaux pour conjurer le mal, un Président de droite défiait son camp en taxant les énergies fossiles, le sursaut était là. Et tout a disparu, dans une opinion zappeuse ou simplement découragée?
On peut raconter la déconstruction d’une conscience collective. Commencer par la démagogie d’une gauche - Royal la première - incapable de soutenir une juste taxe carbone, puisque proposée par l’ennemi; poursuivre par le coup de bambou de Copenhague, quand les maîtres du monde n’ont affiché que leur impuissance verbeuse; en finir par la fatigue d’une droite finalement contente de ne plus s’embêter avec des carabistouilles, et cette tristesse rageuse du pouvoir, actant sa défaite pour sauver sa peau. Il ne faut pas en vouloir à Sarkozy dans cette histoire, qui se sera beaucoup battu contre lui-même, et sa culture, et ses amis et tous les autres, mais qui refuse de se suicider pour une cause devenue perdue. On n’est pas président pour être Antigone et mourir d’une vérité…
Dans cette défaite, le désarroi des scientifiques est troublant, qui en appellent au pouvoir pour qu’il les revalide contre les charges d’Allègre. Comme s’ils avaient besoin de cela, l’adoubement princier. On touche ici à la peur des guetteurs, à leur erreur tactique peut-être. Détenteurs d’une vérité dramatique pour l’humanité, ils sont descendus dans l’agora, ont entrepris de conquérir les esprits - mais en sont devenus les otages de l’opinion commune: et quand celle-ci se retourne…
Ils se trompent pourtant, les scientifiques, s’ils pensent que la parole des politiques les sauvera. Elle ne changera rien aux catastrophes à venir. Sarkozy peut défendre le Giec et Pécresse soutenir les chercheurs anti- Allègre, on ne leur demande pas ça: leur domaine n’est pas le verbe, mais l’action. C’est leur échec d’abord, aux gouvernants, leur incapacité à répondre à l’urgence écologique, qui incite les gens à se réfugier dans l’aboulie mentale: on ne peut pas gagner cette bataille, faisons comme si elle n’avait pas existé, lisons Allègre et advienne que pourra… Tout est à reprendre donc, entre les taxations carbone, les "Fonds verts" à l’international, les deals à passer avec la Chine… Tout ce qu’il faut faire, qui a été raté, qu’il faut pourtant reprendre, puisque la vérité est inchangée. Que les hommes de pouvoir prennent notre destin au sérieux, même sans nous, même contre nous, et même au risque d’eux-mêmes.
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