Le grand nombre d'abstentions de dimanche dernier a résonné comme un coup de tonnerre. Mais va-t-il réveiller les endormis du scrutin ? Pas si sûr, car beaucoup semblent se sentir hors de ces joutes politiques qui, pensent-ils (mais à tort), ne les concernent que de très loin.
Ces dernières semaines, Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la République, a rendu son rapport annuel. On peut y lire ceci : « Je suis inquiet, car je perçois, à travers les dossiers qui me sont adressés, une société qui se fragmente, où le chacun pour soi remplace l'envie de vivre ensemble, où l'on devient de plus en plus consommateur de République plutôt que citoyen... Un fossé s'est creusé entre le citoyen et l'État... Il y a comme une 'France des invisibles'... Je suis frappé par la cohabitation de deux types de sociétés : l'une, officielle, que nous connaissons tous ; l'autre, plus souterraine, qui vit d'aides, de travail au noir et de réseaux... Politiquement, cela peut mal tourner. L'histoire a montré que le ressentiment et la peur nourrissaient le populisme... On aurait intérêt à sortir du petit jeu politicien. »
Faut-il voir, dans ce décalage, la cause ou l'une des causes de la forte abstention ? Sans doute. Les démocrates devraient donc non seulement s'inquiéter de ce détournement massif des urnes, mais aussi et surtout de ses causes.
Si beaucoup de Français ne se sentent pas concernés par la chose publique, s'ils estiment que les alternances droite-gauche sont une sorte de « jeu politicien » qui ne les concerne pas, s'ils pensent que tout est pareil, que tout se vaut, on peut en effet s'inquiéter de ce délitement de notre démocratie.
Pourtant, on pourrait aussi se réjouir de ceux qui votent. « Si l'on ne disposait pas du droit de vote, on se battrait pour l'obtenir », disait une jeune fille qui, pour la première fois, votait dimanche dernier. « Alors je vote ! », proclamait-elle.
Aux élus de ne pas la décevoir et de sortir des petits « jeux politiciens » pour servir le bien commun sans démagogie, car c'est cela que chacun attend de ses représentants. Encore faut-il le faire bien et le faire savoir pour que chacun se sente associé à cette tâche indispensable.
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