L'échec de la droite, admis tardivement par François Fillon, aurait pu s'accompagner d'un raz-de-marée de l'opposition. Les résultats des régionales, s'ils valident le bilan des majorités socialistes sortantes, doivent être examinés avec lucidité : derrière le trompe-l'oeil des pourcentages et d'une abstention toujours forte, la gauche doit beaucoup sa victoire à la défaite de la droite. Ce qui signifie que gagner les régionales n'est pas une assurance pour la présidentielle.
Avec seulement 18 % des électeurs inscrits et huit ministres battus sur huit, il faut parler de déroute de l'UMP. Par rapport à 2004, où elle avait déjà perdu presque toutes les Régions, elle recule de 1,5 million de voix. Elle ne peut guère l'attribuer au Front national qui perd un tiers de ses voix, excepté quelques scores locaux remarquables.
En ce week-end de rugby, socialistes et écologistes doivent se contenter d'un petit chelem. D'abord parce qu'on ne sait plus très bien la couleur du Languedoc-Roussillon. Ensuite, parce que l'Alsace reste à droite, sans parler, mais dans des circonstances très particulières, de La Réunion et probablement de la Guyane. Surtout, parce que l'alliance PS-Verts-PC, victime aussi de l'abstention, n'a pas retrouvé tout son électorat de 2004, malgré trois millions d'inscrits en plus.
Ce résultat, on en connaît les causes. La question est désormais de savoir si les politiques sauront retrouver la confiance de citoyens mécontents et, plus grave, désabusés ou indifférents.
Ce n'est pas le remplacement de quelques ministres qui va remonter le moral des Français. On est trop loin de la présidentielle et François Fillon, reçu ce matin à l'Élysée, reste trop populaire pour tenter un électrochoc à travers un changement de Premier ministre. Il faudrait surtout un gros travail de fond.
D'abord, les partis vont devoir se remuer. L'UMP pour entendre l'opinion. Le PS et les écologistes pour s'entendre sur une conception de la croissance, pour imaginer comment relancer le pouvoir d'achat avec des caisses vides ; imaginer une fiscalité qui ne casse pas la reprise ; compter avec Ségolène Royal, forte de son excellent score. Europe Écologie, enfin, pour passer de l'amateurisme des Verts au professionnalisme d'un parti désormais installé.
Ensuite, les Régions, laboratoires de la gauche « diverse », vont devoir prouver qu'elles sont assez fortes pour évoluer en première division mondiale, pour jouer, à la fois, la défense sociale et l'attaque économique. Avec des moyens figés et le gel possible, pour cause de compromis, de projets structurants dans l'énergie ou les transports, on risque d'établir, dans quatre ans, un bilan mitigé.
Enfin, dans un tel état de fragilité et face à la montée en puissance de Martine Aubry, la fin du quinquennat s'annonce très délicate s'il se poursuit avec les mêmes méthodes. Sans moyens et sans croissance forte, Nicolas Sarkozy devrait, à la fois, assainir les comptes publics - ce n'est pas le moment d'emmener l'Europe dans le fossé - réformer les retraites, financer le risque dépendance, endiguer les licenciements et aider 360 000 chômeurs supplémentaires en fin de droit.
Dans les mois qui viennent, il est probable que l'on verra moins de manifestants devant les Régions - ce qui serait la preuve que les 1 880 conseillers élus hier ont de réels pouvoirs ! - que devant les préfectures.
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