mercredi 10 septembre 2014
La République des fraudeurs
Les déclarations, la main sur le cœur, de Jérôme Cahuzac, jurant n’avoir jamais eu de compte en Suisse, n’ont pas fini de résonner dans l’hémicycle que déjà « l’affaire Thévenoud » vient nous conforter dans l’idée que, aussi moralisateurs soient-ils, ces socialistes sont les premiers à s’asseoir sur l’éthique. Ainsi, lundi, le député et éphémère conseiller d’Etat Thomas Thévenoud, ancien vice-président de la mission d’information sur la fraude fiscale et de la commission d’enquête sur l’affaire Cahuzac (!), qui ne payait pas ses impôts depuis des années, a-t-il officiellement annoncé sa « mise en retrait » du PS. En revanche, a-t-il ajouté, pas question de quitter son siège de député !
« Sanction symbolique »
Sous la pression des médias et d’une partie de la classe politique qui sent bien les effets ravageurs de cette nouvelle affaire au moment où Marine Le Pen est donnée en tête des sondages, le député PS de Saône-et-Loire a en effet expliqué qu’après s’être entretenu avec Jean-Christophe Cambadélis, Premier secrétaire du PS, il avait finalement décidé de se « mettre en retrait du Parti socialiste et donc du groupe SRC à l’Assemblée nationale ». Mais pas question d’aller au-delà : là où un minimum d’amour-propre aurait poussé n’importe quel homme à quitter son siège à l’Assemblée, Thévenoud a, lui, décidé de rester. Ce qui signifie concrètement qu’il continuera à être député de Saône-et-Loire mais ne siégera plus dans l’hémicycle parmi ses collègues socialistes. Il devrait rejoindre les non inscrits, comme c’est déjà le cas d’un autre ex-député PS, Sylvie Andrieux, qui siège là depuis 2013 et sa lourde condamnation pour détournement de fonds publics… Une solution qui, au fond, arrange les socialistes, comme le soulignait Olivier Pirot dans La Nouvelle République du Centre Ouest, puisque cette « sanction symbolique » leur permet de « ne pas trop perdre la face » et « de sauver du bout des doigts la majorité » absolue qui ne tient qu’à une voix.
« Enchaînement de négligences »
Reste, comme l’écrivait Nicolas Beytout dans L’Opinion, que « ce qu’il représente est ravageur, et la seule perspective de le voir revenir maintenant sur les bancs de l’Assemblée nationale semble une insulte à tous les contribuables en règle avec leur percepteur ». Voilà en effet un couple, lui député de Saône-et-Loire (entre autres), et elle chef de cabinet du président du Sénat (mise en retrait depuis), qui depuis des années ne payait pas ses impôts, lorsque des millions de Français se demandent comment ils vont réussir à régler les leurs !
Et l’élu socialiste de dénoncer lundi un « acharnement médiatique », de nous expliquer qu’il est aujourd’hui victime d’un « enchaînement de négligences choquantes qui m’ont placé dans cette situation » et qui ne font pas de lui « un fraudeur » !
Depuis, a précisé fièrement Thomas Thévenoud, « j’ai réglé à ce jour l’ensemble de mes impôts avec, comme tout contribuable dans cette situation, l’intégralité des pénalités de retard ». Bravo M. le député ! Ainsi saurez-vous maintenant ce que veut dire « contribuable français » lorsque vous emploierez cette expression dans l’hémicycle…
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