mardi 25 mars 2014
La débâcle socialiste met Hollande sous pression
Le chef de l'État, qui se refuse à changer de ligne, est invité par sa majorité à envoyer des signaux à l'électorat PS.
Gueule de bois à l'Élysée. François Hollande savait que les résultats des municipales seraient mauvais. Il s'en était ouvert devant ses proches, s'y était préparé. Mais les retours des élus de terrain, qu'il interrogeait sans relâche par SMS, au téléphone, ou dans les salons de l'Élysée, de même que les derniers sondages, laissaient espérer un recentrage sur les enjeux locaux et la reconduction de nombreux maires de gauche, qui n'avaient pas démérité. Las. Ce premier tour, qui fait la part belle au FN, a validé le scénario du pire. «On pouvait s'attendre à des résultats moins mauvais, glisse un conseiller. Personne n'affiche de sourire radieux.»
Le président, qui devait rester deux jours à La Haye, pour une réunion du G7 sur l'Ukraine et un sommet sur la sécurité nucléaire, a décidé de rentrer dès lundi soir à Paris. Il préparera sa contre-attaque mardi, avant d'être accaparé les deux jours suivants par la visite d'État du président chinois Xi Jinping. Après avoir analysé les résultats jusqu'à près de minuit dimanche, ses proches se voulaient prudents lundi. «Les électeurs ont exprimé une colère, note un proche. Mais le scrutin n'est pas terminé. L'heure est à la bataille.» «On a connu pire», relativisait un autre, évoquant 1978 et 1983. «Ce ne fut pas une soirée agréable mais nous ne passons pas notre temps à errer dans les couloirs ou à nous lamenter. Il faut avancer. Plus vite on avancera, plus vite on aura des résultats. Or c'est ce que les Français réclament.»
Ces résultats électoraux «cataclysmes», selon les mots d'un conseiller ministériel, accentuent encore la pression sur Hollande, sommé de «bouger». «Le président déteste les hystéries, les grands mots, les réactions à chaud, tempère le député de Paris Jean-Christophe Cambadélis. Il attend les résultats du second tour avant d'en tirer les conclusions.» Ce vote sanction intervient au plus mauvais moment pour le chef de l'État, qui préparait des annonces délicates pour avril, dont le pacte de responsabilité et les 50 milliards d'économies. Des efforts sans précédent mais douloureux pour les Français et une majorité qui attend d'autres messages que la maîtrise des déficits publics. «Ce premier tour tue la théorie selon laquelle la France est prête à faire des sacrifices pour ne pas rater son rendez-vous avec l'Histoire», soupire un dirigeant PS.
Hollande sait que sa majorité, dont certains commencent mezzo voce à réclamer un changement de ligne, lui demandera des comptes dimanche prochain. «Il est coincé, résume un poids lourd PS. S'il en fait trop, il est sanctionné par les électeurs. S'il n'en fait pas assez, il est sanctionné par Bruxelles et les marchés.» Dans l'entourage du président, on répète qu'il n'y aura pas de changement de cap. Les dirigeants de la majorité, réunis à Matignon lundi, ont tenté de résoudre ce dilemme: comment laisser entendre que le gouvernement avait entendu le message des urnes tout en répétant qu'il ne changerait pas de cap? «En expliquant que les Français veulent de la justice dans le redressement», explique un participant.
Reste que François Hollande, s'il veut être réélu en 2017, va devoir reconquérir l'électorat traditionnel de la gauche, qui s'est abstenu ou a voté contre le PS. Il devra reconquérir aussi ceux qui ont fui vers le FN. «Si on ne peut pas changer la ligne, il faudra faire des ajustements sérieux et envoyer des signaux à tous ces invisibles dont on parle si peu», plaide le député PS Thierry Mandon, qui évoque plusieurs pistes: revenir sur la défiscalisation des heures supplémentaires, faire un geste pour les petites retraites. «Le président doit prendre en compte les couches populaires et moyennes qui réclament plus de pouvoir d'achat et de protection», ajoute le député PS Laurent Baumel.
À défaut de changer de cap, Hollande pourra difficilement faire l'impasse sur le remaniement d'un gouvernement à bout de souffle. «Le seul levier dont il dispose pour dire aux Français «je vous ai compris», c'est le remaniement», analyse un dirigeant PS. Dès dimanche soir, de nombreux socialistes assuraient que le sort de Jean-Marc Ayrault était scellé. Mais ceux qui connaissent la faculté du président à faire le dos rond croient encore qu'un second tour meilleur que le premier pourrait l'inciter à ne rien faire. «Impossible!, s'alarme un socialiste de Saône-et-Loire, où des bastions qui avaient voté à plus de 60 % pour Hollande en 2012 ont lâché le PS. «Le pays est au bord de la rupture définitive avec la gauche, poursuit-il. Si Hollande ne fait rien, on est morts.»
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