Aujourd'hui, l'Espagne pourrait mourir de sa double crise de solvabilité. Il y aurait bien trois remèdes, mais leur coût serait immense, et le pire, une sortie de l'euro, fait froid dans le dos.
Le cas espagnol est extrêmement inquiétant. C'est le seul grand pays de la zone euro incapable de rembourser ses dettes. Car il est empêtré dans une double crise de solvabilité. D'abord au niveau budgétaire, avec un déficit public plus important que jamais et qui ne cesse de s'aggraver. Ensuite au niveau externe, avec un déficit extérieur chronique et un taux d'endettement très élevé. Cette perte de solvabilité externe est la plus grave des deux: le Japon ou les Pays-Bas, qui ont un déficit public mais un excédent extérieur, peuvent compter sur l'épargne des particuliers pour financer l'Etat. Ce n'est pas le cas de l'Espagne. En outre, dans ce genre de situation, c'est habituellement le FMI qui opère, avec une forte dévaluation à la clé. Ce n'est bien sûr pas possible pour l'Espagne de par sa présence dans la zone euro. Pour rétablir sa solvabilité extérieure, seules trois possibilités s'offrent à elle.
La première est un ajustement réel. C'est la solution actuellement mise en oeuvre, sous la pression de l'Allemagne et de la Banque centrale européenne. Le retour à la solvabilité se fait via des politiques budgétaires très restrictives (encore près de 3% du PIB économisés en 2012) et une baisse des coûts salariaux. Ce dernier point permet de relancer un peu la compétitivité. Mais la baisse des prix ne suivant pas, les salaires réels chutent, la consommation et le PIB s'effondrent, et le taux de chômage explose (près de 30% prévu en 2013, plus de 60% pour les jeunes!). L'ajustement réel est donc très coûteux en emplois et accentue les tensions sociales.
Deuxième piste: un peu de solidarité. L'Europe, en particulier l'Allemagne, pourrait adopter une stratégie coopérative et aider les Espagnols à se financer à des taux d'intérêt plus bas. Car, aujourd'hui, plus personne ne veut prêter à l'Espagne, ce qui fait grimper les taux à dix ans sur la dette publique à plus de 6%, un niveau insupportable compte tenu de la récession (- 2% cette année). Cela étrangle l'économie, puisque cette hausse des taux se transmet aux coûts de financement des banques et des entreprises, et fait reculer le crédit. La stratégie coopérative permettrait aussi de favoriser le développement du secteur exportateur en Espagne, par exemple en subventionnant le capital qui accepterait d'y investir. Pour l'instant, les autres pays de la zone euro sont hostiles à cette piste.
La troisième solution fait froid dans le dos, car il s'agit ni plus ni moins de sortir de l'euro et de dévaluer pour résoudre la crise de solvabilité. Le coût serait immense, mais il faut bien voir que l'ajustement réel ne débouche sur rien, et que la trajectoire suivie par l'Espagne n'a pas de sens.
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