Après avoir pris connaissance de la mise au point de Frédéric Mitterrand assurant que "le tourisme sexuel est une honte", Benoît Hamon avait prévenu : "L'affaire laissera des traces." Celles-ci n'épargnent pas le Parti socialiste. Les déclarations de son porte-parole dénonçant les écrits d'un "ministre-consommateur" et jugeant "choquant", dans la foulée du FN, "qu'un homme puisse justifier, à l'abri d'un récit littéraire, le tourisme sexuel", ont déclenché, vendredi 9 octobre, une nouvelle tempête dans les rangs du parti.
En réagissant aux propos de Marine Le Pen qui s'en était pris au livre La Mauvaise Vie du ministre de la culture, M. Hamon "n'exprimait en aucun cas une position collective du Parti socialiste", a protesté Harlem Désir, qui occupe le rang de numéro deux du PS. Le député européen est proche de Bertrand Delanoë, qui a pris la défense de Frédéric Mitterrand en dénonçant "une offensive populiste".
Harlem Désir considère "qu'en politique, tous les coups ne sont pas permis" et dénonce une "chasse à l'homme". "Nous combattons avec la plus grande rigueur le tourisme sexuel et la pédophilie", mais "nous n'avons pas à pratiquer l'amalgame et la calomnie", assure-t-il. M. Hamon rétorque qu'il "assume la totalité de (s)es propos" et juge "honteux" d'être accusé d'avoir emboîté le pas à Marine Le Pen.
A peine avait-elle lancé un appel à l'unité des dirigeants socialistes que Martine Aubry est une nouvelle fois contrainte de ramener le calme. "Comprenons aussi que Benoît Hamon a pu avoir une réaction de sensibilité, comme tous les Français qui liraient ce livre", estime la première secrétaire, qui souhaite que l'on évite "de faire des amalgames". D'autres membres de la direction apportent leur soutien à Benoît Hamon. "Sa prise de position n'était pas nourrie par des considérations morales mais par la question sociale", insiste le fabiusien Guillaume Bachelay, convaincu que, "quand on est de gauche, on ne peut que combattre le commerce tarifé des corps".
Patrick Bloche plaide également en faveur du porte-parole du PS. Il juge qu'on lui "intente un procès injuste". "Dommage qu'il ne soit pas intervenu dès qu'a éclaté l'affaire Polanski", remarque toutefois le député et maire du 11e arrondissement de Paris. Quant à Razzy Hammadi, proche de Benoît Hamon, il assure que le porte-parole du PS "a répondu avec nos principes et nos valeurs, n'en déplaise à une certaine élite parisienne." L'ancien président du Mouvement des jeunes socialistes estime que "même si l'on appartient à une élite culturelle ou politique, on a quand même des comptes à rendre sur ces questions". Il assure que l'offensive "anti-Mitterrand" ne visait pas à mettre en porte à faux le ministre de la culture, "qui est un homme de droite", avec l'électorat conservateur.
Une fois n'est pas coutume, le député de l'Essonne Manuel Valls soutient aussi Benoît Hamon. Pour lui, les dissonances au sein du Parti socialiste sur l'affaire Mitterrand expriment "un clivage générationnel autour de ce que doivent être la liberté et les règles".
Mais d'autres considérations, plus internes, ont sans doute aussi joué. Des critiques sont adressées de façon récurrente au porte-parole du PS par ceux qui estiment que Martine Aubry, liée par l'accord passé avec l'aile gauche du PS à l'issue du congrès de Reims, lui octroie une trop grande liberté de manoeuvre. Dans un communiqué, le député européen Stéphane Le Foll, proche de François Hollande, déplore des "initiatives personnelles" qui "mettent à mal la cohérence de notre expression" et traduisent un déficit de "délibération collective". Plus direct, Julien Dray remarque que "la fonction de porte-parole implique des devoirs et ne donne pas simplement le droit à la parole". Le député de l'Essonne dénonce "une tactique de mise au pied du mur de tout le Parti socialiste qui n'est pas acceptable".
Jean-Michel Normand
lundi 12 octobre 2009
Les déclarations de Benoît Hamon sur "l'affaire Mitterrand" provoquent une polémique au PS
HAMON DEVRAIT SÈRIEUSEMENT PENSER À DÉMISSIONNER
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